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reçut point de suite, ni la population polonaise aucune concession.

Toute la Haute-Silésie sur la droite de l’Oder jusqu’à Leobschutz est éminemment polonaise de langage. Nulle part d’ailleurs, nous ne pouvons tracer une ligne de démarcation précise entre le territoire polonais et le territoire allemand. Partout les localités allemandes empiètent sur le domaine polonais, de même que des communes en majorité polonaises restent éparpillées dans des districts à peu près complètement germanisés. Dans la Silésie autrichienne, les recensemens établis sur le langage accusent une moindre proportion de l’élément allemand que de l’autre côté de la frontière prussienne, par la raison simple que l’Autriche n’a pas su ou voulu exercer la germanisation à haute pression, suivant l’exemple de la Prusse. Passons-nous sur la rive gauche de la Biala, dans la Galicie occidentale, naguère partie de la Silésie, nous n’y trouvons pas plus de 10 pour 100 d’Allemands, voire seulement 3 pour 100 dans le district de Cracovie. Pour grossir la proportion de l’élément allemand en Pologne, les chauvins comme Bœckh s’évertuent à y comprendre les juifs, qui, dans le district de Cracovie, comptent pour 7 pour 100. A l’intérieur de la Pologne russe, dans les gouvernemens de Plock, de Varsovie et d’Augustowo, on a noté, lors du recensement de 1860, en y comptant la partie momentanément prussienne du gouvernement de Grodno, et aptes déduction de la partie lithuanienne, sur une population d’environ 2,800,000 habitans, trois quarts de Polonais, un huitième de juifs et un douzième d’Allemands. La population allemande du territoire momentanément annexé à la Prusse provient de colons établis à cette époque sur les domaines de l’état. A Varsovie, les juifs entrent pour 26 pour 100 dans la population totale, les Allemands pour 4 pour 100 seulement. Boeckh reproche à Koeppen, un termes très vifs, de n’avoir pas compté les juifs avec les Allemands dans son étude sur la population de la Pologne. Il évalue à 235,000 le nombre des habitans allemands de la Pologne russe, plus 620,000 juifs. Que si l’on considère ensemble les territoires polonais de la Prusse, de la Russie et de l’Autriche, leur population totale s’élève aujourd’hui à 10,000,000 d’habitans, dont plus de 8,000,000 de sujets polonais, 900,000 juifs et 850,000 Allemands : en sorte que l’élément polonais y entre pour 80 pour 100, l’élément allemand pour 8,5 pour 100, et l’élément juif pour 9 pour 100. Juifs et Allemands réunis ne dépassaient pas en 1869 le nombre de 854,000 dans tout l’empire de Russie. Ces chiffres offrent un intérêt sérieux à une époque où, comme maintenant, les questions de nationalité fixent l’attention des hommes d’état.

Par suite du traité de Francfort, l’empire d’Allemagne a reculé ses frontières occidentales de la ligne du Rhin sur le faîte des