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simples témoins sans action, dont le seul rôle est de surprendre les élémens dans leur travail. Cherchons donc les lois (s’il y en a) des mouvemens atmosphériques. Commençons par la température.

Il faut d’abord se figurer que dans cet espace immense qui s’étend entre le soleil et la terre, — 40,000,000 de lieues, — il n’y a pas de matière pondérable (du moins nous l’admettons), et que la température y est très basse ; on ne la connaît pas. A la vérité, Pouillet a cru pouvoir la fixer approximativement à — 142 degrés, mais ni lui ni d’autres ne l’ont jamais mesurée. Contentons-nous donc de cette affirmation vague : elle est très basse. Mais, au voisinage de la terre, à une centaine de lieues tout au plus, l’air commence à se montrer, d’abord très rare, puis se condensant et s’accumulant peu à peu, de proche en proche jusqu’au sol, jusqu’à la pression finale de 0m,760. C’est cet ensemble que les rayons solaires sont obligés de traverser avant de nous parvenir. Ils franchissent d’abord le vide sans y rien perdre de leur intensité ; aussitôt qu’ils entrent dans l’atmosphère, dont la transparence n’est pas absolument complète, ils sont absorbés partiellement par les molécules d’air qu’ils échauffent en y laissant ce qu’ils perdent eux-mêmes ; cette perte qu’ils font, cette chaleur que gagne l’air, vont en s’exagérant jusqu’en bas ; après quoi, le sol qui a recueilli tout ce que l’air avait laissé passer, le renvoie par une marche inverse depuis le bas jusqu’en haut.

Ce mécanisme est vérifié par une première et curieuse conséquence. Un thermomètre, quand il est placé vers les limites supérieures de l’air et à l’ombre, marque un froid considérable, le froid de l’espace en cet endroit ; mais s’il est exposé aux rayons du soleil, il en reçoit toute l’énergie, qui n’a point encore été diminuée, et monte à un degré considérable. M. Flammarion, à 4,150 mètres, a noté — 9° à l’ombre, et + 19°,3 au soleil ; la différence était presque égale à 30°. Mais, sur le sol, il en est tout autrement ; le rayonnement solaire étant très affaibli par les absorptions qu’il a subies, et réchauffement de l’air très augmenté par les gains que ce gaz a faits, la différence entre les températures au soleil et à l’ombre est beaucoup moins sensible. Cela nous apprend qu’il ne faut pas mesurer la température ambiante au soleil, ce serait apprécier la chaleur versée par l’astre, mais à l’ombre, c’est-à-dire la chaleur acquise par l’air au moment considéré.

Il est évident que cette absorption partielle de la chaleur solaire augmente en même temps que la densité de l’air à mesure qu’on approche du sol, et qu’on doit inversement rencontrer des froids de plus en plus vifs en montant avec le ballon. C’est en effet ce qui a lieu. C’est peut-être le phénomène le plus important de la