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capital que leurs bras, ils peuvent acheter facilement un homestead en se louant quelque temps comme garçons de fermes, car leurs salaires varient de 125 à 150 francs par mois : on cite l’exemple d’un cordonnier anglais qui, arrivé dans le Nord-Ouest avec 2 dollars 1/4 en 1879, possède aujourd’hui 480 acres de terre. A vrai dire, il fait un peu froid là-bas, puisqu’en hiver le thermomètre descend jusqu’à 25 degrés au-dessous de zéro ; mais les labours commencent au mois d’avril, la neige disparaît alors, et on s’y habitue vite, paraît-il, car les Canadiens adorent leur climat, et c’est chez eux un dicton populaire que l’homme qui aime bien son pays n’y a jamais froid : nulle part non plus il n’y a autant de centenaires qu’au Canada. Cependant, la neige à bien quelques inconvéniens, et c’est ainsi que, dans une des provinces maritimes, le retard d’un train qui portait un député, et avec lui la fortune du ministère, faillit avoir des suites funestes : « En vain, pour l’attendre, écrit M. Hector Fabre, tous les orateurs de la droite avaient-ils épuisé leur éloquence ; il ne restait plus sur la brèche que le premier ministre, qui parlait déjà depuis quarante-huit heures et qui commençait à se sentir un peu las. Enfin, le train entre en gare, et, de joie, le premier ministre s’évanouit dans les bras de la majorité. »

Presque au milieu du Dominion, à égale distance du pôle et de l’équateur, se trouve le territoire du Manitoba. Là vivait, en 1869, une population demi-nomade, les Half-Bred, en français les Bois-Brûlés, nés en majeure partie de mariages entre les Indiennes et les Français-Canadiens, parlant notre langue et professant la religion catholique. Après le rachat de ce territoire à la compagnie