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près uni et plat. Arrivés sur le littoral de la mer Baltique vers le Ⅳe siècle de notre ère, les peuplades germaniques s’avancèrent du côté de l’ouest en refoulant les Celtes et suivies elles-mêmes de près par les Slaves. Lors des voyages de Pithéas de Marseille, entrepris pour reconnaître les limites et la forme de la terre, 340 ans avant Jésus-Christ, le cours de l’Elbe parait avoir séparé les Germains des Celtes. On trouve des noms celtiques disséminés à travers toute l’Allemagne, témoignage d’une occupation durable du territoire par le peuple qui a laissé ces noms à côté de ses tombeaux. Au-dessous de ces tombeaux celtiques, des fouilles nombreuses ont mis à jour, dans les dépôts d’alluvions de l’époque quaternaire, des restes humains beaucoup plus anciens, provenant des habitans primitifs dont les anthropologistes cherchent encore à déterminer la race. Hérodote, le premier écrivain de qui nous tenions des notions exactes sur les Celtes, place les sources du Danube dans leur pays. À cette époque, les Germains, encore inconnus des Grecs et des Romains, étaient cachés au monde civilisé par la forêt Hercynienne, derrière les montagnes de la Haute-Allemagne, allant des Vosges aux Karpathes. César trouva Germains et Celtes aux prises sur les bords du Rhin et sur le versant alsacien des Vosges. Le mur païen du Mont-Sainte-Odile était une des places de refuge des peuplades celtiques lors des premières invasions germaniques. Après leur romanisation, les Celtes continuèrent à occuper la rive droite du Danube longtemps après ces invasions. Ils se fondirent avec les Germains moins par des mariages et par le sang que par l’adoption de la langue allemande, comme ont fait plus tard les Slaves du Brandebourg et de la Poméranie. La nation allemande actuelle offre tous les caractères d’une race mêlée.

Sans l’opposition des Romains, maîtres de la Gaule, les Germains auraient peuplé en masse toute la France d’aujourd’hui. A l’étroit chez eux, sur des territoires peu productifs et mal cultivés, croissant en nombre rapidement et soutirant de la disette, ils allaient en avant, une peuplade poussant l’autre, à la recherche de meilleurs sites. Cette poussée lente, mais continue et irrésistible, pareille au mouvement d’un puissant courant de glace qui se dilate et s’étend sous l’effet du regel de l’eau qui augmente sa masse en remplissant ses fissures, agissait dans tous les sens pour se manifester surtout du côté de la moindre résistance. Les obstacles opposés an mouvement par la nature ou par les hommes devenaient-ils trop forts pour être surmontés, les migrations tournaient ces difficultés. Au dire de Strabon, les Cimbres chassés du Jutland par l’invasion de la mer, à la suite de violentes tempêtes, après avoir été arrêtés dans leur marche vers le sud par les Boiens Celtes de la forêt Hercynienne, contournèrent les Monts-Sudètes, à travers la Silésie, pour atteindre le