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Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 68.djvu/341

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public et la tradition ; accorder une large place à l’érudition, à la recherche pure et désintéressée, dans les lettres aussi bien que dans les sciences sans tomber dans le pédantisme et la minutie. Le problème, on le voit, ne laissait pas d’être compliqué. Je ne ferai que rappeler en passant les diverses solutions qui lui furent données, à savoir : l’introduction des exercices didactiques dans les facultés des lettres, l’ouverture de laboratoires d’enseignement dans les facultés des sciences, l’établissement des écoles normales secondaires, enfin la fondation de l’École des hautes études.

Le développement des exercices didactiques dans les facultés des lettres n’impliquait nullement l’abandon de la « grande leçon, » si sévèrement condamnée par M. Renan et si malmenée depuis par quelques gens d’esprit égarés dans la foule des badauds, des fruits secs et des envieux. Dans la pensée de l’administration, tout au contraire, il importait de garder soigneusement l’usage de ces expositions « élégantes, spirituelles, parfois éloquentes, qui élèvent le niveau de l’instruction générale et maintiennent heureusement le goût des études patientes et difficiles dans un temps d’improvisation littéraire. » Seulement, à ces généralités, susceptibles d’intéresser un nombreux auditoire, il avait paru bon d’ajouter des conférences d’un caractère pratique s’adressant à de véritables étudians, capables de les retenir et de les grouper par l’appât d’une culture plus scientifique et plus suivie.

Pareillement, en science, l’enseignement par la parole, les brillantes démonstrations d’un Dumas ou d’un Jamin, n’étaient, pas suffisantes. L’essentiel, sauf dans les mathématiques pures, c’était d’exercer les étudians, de leur apprendre à préparer une expérience, à faire une analyse, à se servir des instrumens et des procédés particuliers à chaque genre de recherches. C’était de créer des laboratoires à leur usage ou de leur ouvrir ceux qui existaient déjà. De là le décret du 31 juillet 1868 et la distinction établie pour la première fois entre les laboratoires d’enseignement et les laboratoires de recherches : ceux-ci restant le domaine privé, le home scientifique du professeur et de quelques collaborateurs choisis ; ceux-là destinés à devenir, pour la jeunesse vraiment studieuse de nos facultés des sciences, des écoles d’apprentissage et de manipulation.

La création d’écoles normales secondaires aux chefs-lieux d’académie rentrait dans le même ordre d’idées et de préoccupations. Ce qui avait jusque-là manqué le plus, en province, aux candidats à la licence et à l’agrégation, c’étaient les moyens de se préparer sérieusement à ces examens. Un grand nombre de maîtres répétiteurs, pour ne parler que de ceux-là, languissaient dans nos collèges sans pouvoir s’élever jusqu’au professorat. Mettre à la portée