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de ces jeunes gens un enseignement, des secours, une direction qui leur permissent d’affronter nos concours et, du même coup, former pour nos facultés un premier noyau d’auditeurs assidus, tel était le but de l’institution ; elle s’est modifiée depuis : le nom qui lui avait été donné dans le principe et qui ne répondait peut-être pas assez exactement à l’idée matérielle qu’éveille généralement le mot d’école, a disparu ; la chose est demeurée cependant sous une autre forme.

Mais il ne suffisait pas d’offrir au public spécial des candidats les moyens de s’instruire et de gagner ses grades ; il fallait, afin de compléter cet ensemble de mesures, créer à côté de la Sorbonne un enseignement d’un caractère plus désintéressé pour le petit nombre de jeunes gens voués à la recherche pure et à l’érudition, sans souci de carrière. L’École des hautes études parut répondre à ce besoin, et c’est de cette pensée qu’elle naquit. Accueillie dès le principe avec une faveur marquée par les corps savans de France, consacrée par les suffrages les plus flatteurs et par de hautes distinctions à l’étranger, elle n’eut pas de peine à se faire sa place dans l’ensemble de nos institutions. La section des sciences historiques et philosophiques elle-même, qui avait à lutter contre la redoutable concurrence du Collège de France, de l’École des chartes et de l’École des langues orientales, prit très vite une remarquable extension. Lors de la dernière statistique, parue en 1883, elle ne comptait pas moins de deux cent trente-huit élèves suivant vingt-huit à trente cours différens, et sa Bibliothèque, dont plusieurs ouvrages sont des autorités dans la science[1], en était à son cinquante-septième fascicule.

Tel était, quand l’empire disparut, l’état des choses ; dès lors, à part la grosse question des universités régionales encore à l’étude, on peut dire que le problème soulevé six ans auparavant était en grande partie résolu. Sans doute, les changemens intervenus n’avaient encore donné que des résultats incomplets ; sans doute, les crédits annoncés se faisaient attendre et les travaux promis étaient à peine commencés. Mais les lignes générales, le cadre de la réforme, avaient été très nettement tracés ; la direction, le but, en avaient été déterminés avec précision, et sur la route à parcourir les plus grands obstacles à vaincre encore étaient de ceux dont le temps et l’argent devaient aisément triompher.

Il fallait du temps pour que l’usage des exercices didactiques s’établit dans celles de nos facultés qui ne les connaissaient pas encore, pour qu’il s’étendit et se généralisât dans celles qui les pratiquaient déjà. Il fallait du temps pour que l’École des hautes études se

  1. Le mot est de M. Albert Dumont.