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terrestres ont été quelquefois assez fortes pour incliner des arbres jusqu’à leur faire toucher le sol avec leurs branches.

Ces deux modes d’ébranlement peuvent s’associer entre eux, ou se succéder à de très courts intervalles. Pour en constater avec précision l’intensité, la direction et la durée et même enregistrer leurs caractères, on se sert d’appareils variés nommés séismographes ou seismomètres, analysateurs, ainsi que de pendules convenablement disposés.

Quelle que soit leur nature, ces effets mécaniques sont d’intensité très variable. Souvent ce sont des ondulations à peine perceptibles et des frémissemens peu inquiétans, qu’au Chili et au Pérou on désigne sous le nom de tremblores, pour les distinguer des véritables terremotos ; quelquefois ce sont des ébranlemens auxquels les constructions en maçonnerie ne peuvent résister. Des villes et des villages se trouvent instantanément transformés en des monceaux de mines, sous lesquelles sont ensevelis des milliers d’habitans. Aussi certains modes de construction sont-ils employés dans les pays sujets aux tremblemens de terre, comme opposant plus de résistance, tant par leur faible hauteur que par la nature et l’agencement de leurs matériaux. Depuis longtemps déjà, au Japon, où les agitations sont absolument journalières, ce sont des pièces de bois reliées par des cloisons en bambous. De même aux Philippines et à Manille en particulier, les maisons sont construites en bois et avec des précautions que l’expérience a enseignées, pour se prémunir contre un péril toujours imminent. A Ischia, un décret royal du 29 août dernier prescrit que, dans les communes de Casamicciola, de Lago-Ameno et de Forio, zones particulièrement dangereuses, toutes les constructions seront à l’avenir faites avec enchevêtrement de bois et de fer.

Dans le mouvement ondulatoire qui est le plus habituel, l’agitation est naturellement plus prononcée au sommet des édifices qu’à leur base. Par exemple, le 25 décembre dernier, au théâtre de Madrid, la galerie supérieure subissait visiblement un balancement, tandis que le parterre était tranquille. Pour la même raison, dans l’intérieur des mines, les mouvemens sont incomparablement moins sensibles qu’à la surface du sol. Parmi de très nombreux exemples, je me bornerai à mentionner ceux que l’on observe journellement au Chili. Un jour que le savant géologue qui a, pendant plus de quarante ans, rendu d’éminens services à l’industrie minérale de ce pays, M. Domeyko, se trouvait au fond des mines d’argent de Charnacillo, à 200 mètres de profondeur, occupé à lover des plans de galeries, sa maison et beaucoup d’autres s’écroulaient au-dessus de sa tête, sans qu’il ressentit la moindre agitation.