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qui s’échappaient ; cependant deux zouaves, qui étaient restés en arrière, furent massacrés la nuit suivante. La colonne, très fatiguée, ne rentra dans ses cantonnemens que le 3 octobre.

Pendant la marche, un acte étonnant d’insubordination avait été commis publiquement par le colonel du 4e de ligne. Il avait demandé au général de Brassard un guide pour son 2e bataillon, qui devait être séparé du 1er par l’artillerie ; sur le refus du général, le dialogue suivant s’était engagé devant la troupe : « Alors, mon général, vous marcherez avec le bataillon, et, s’il s’égare, j’en rendrai compte. — Taisez-vous, colonel ; on ne parle pas de la sorte. Un colonel devant son régiment ! .. — J’en rendrai compte. — Vous garderez les arrêts vingt-quatre heures. — J’en rendrai compte. — Quarante-huit heures. — J’en rendrai compte. » Ainsi de suite jusqu’à quinze jours d’arrêt. Trois jours après, les arrêts du colonel étaient levés par le commandant en chef, et le général de Brossard demandait à rentrer en France.


III

Le combat de Sidi-Haïd parut d’abord avoir des suites heureuses. Dès le 5 octobre, on vit arriver de tous les points des députations envoyées par les tribus pour faire leur soumission et demander la paix. Ben-Zamoun s’était retiré chez les Flissa en déclarant qu’il ne voulait plus se mêler de rien. L’agha Mahiddine avait cherché asile dans les montagnes des Beni-Menad, d’où il adressait au commandant en chef des explications embarrassées sur sa conduite. Le duc de Rovigo, enivré de sa victoire, continuait d’agir à la turque. Il frappa d’une contribution de 200,000 piastres fortes les deux villes de Blida et de Koléa. La seconde, ou plutôt la famille Mbarek, dont les deux principaux membres avaient été emmenés comme otages par le général de Brassard, paya 10,000 francs, et ce fut tout. Les gens de Blida, qui prétendaient avoir fermé leurs portes à l’agha, commencèrent par se dire insolvables, puis ils promirent de payer et ne payèrent point, essayant de gagner le temps où les pluies rendraient la contrainte d’une exécution trop difficile. Le duc de Rovigo, pénétrant leur dessein, donna l’ordre de hâter les poursuites.

Le 21 novembre, une colonne de 3, 200 hommes, composée de quatre bataillons du 4e de ligne et du 10e léger, du 2e bataillon de zouaves, d’une batterie de campagne pourvue de fusées à la Congrève, d’une compagnie de sapeurs, de quatre escadrons de chasseurs d’Afrique, d’une section d’ambulance et d’un convoi de vivres, partit sous les ordres du général de Faudoas, qu’accompagnait le