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prolétariat français, ils demandent (§ XXXVIII) que « la loi future fasse de la caisse des mineurs une institution d’état. » En fait, à les en croire, les caisses de secours sont mal administrées et les ouvriers sont privés d’une partie des ressources qu’elles produisent : en droit, il faudrait créer de vive force une caisse centrale de secours dans chacun des neuf bassins houillers français (plutôt qu’une caisse par exploitation), afin de remédier à la pénurie des petites sociétés et d’imposer partout un même tarif. L’administration de ces caisses locales serait confiée à un conseil mixte de six membres, deux patrons et quatre ouvriers ; la répartition des secours serait faite par un comité de trois ouvriers élus par l’assemblée générale des mineurs dans chaque exploitation. De plus, il est nécessaire de créer une caisse centrale des mineurs, « institution d’état » (§ XXXIX), analogue à la caisse des invalides de la marine, qui s’étendrait à tout le territoire français et serait en même temps une « caisse de prévoyance » et une « caisse de retraite. » On arriverait, d’après des calculs qui nous semblent, à vrai dire, peu concluans, à doubler le tarif des secours.

Ces vœux, plus ou moins fidèlement traduits, ont passé dans quatre des propositions de loi que nous avons énumérées. MM. les députés Reyneau et Gilliot prétendent imposer aux concessionnaires l’obligation de créer d’abord des caisses de retraite, ensuite des caisses du secours et d’abonnement à la caisse nationale d’assurance contre les accidens. Les unes et les autres seraient alimentées par une retenue de 6 pour 100 sur les salaires et par les versemens obligatoires des compagnies, égaux au montant de cette retenue. Les pensions seraient accordées dès l’âge de quarante-cinq ans, après vingt-cinq années de travail. L’administration des caisses serait confiée à une commission mixte, mais où les délégués des ouvriers seraient deux fois plus nombreux que ceux des patrons. MM. Brousse, de Lanessan, etc., imposent également à « tous les exploitans des mines » l’obligation « d’instituer des caisses de retraite et secours dans leurs établissemens » et proposent de les alimenter : 1° par un versement de 10 à 15 pour 100 sur les bénéfices de l’exploitation (sans prévoir le cas où l’exploitation ne donnerait pas de bénéfices) : 2° par une retenue mensuelle de 3 à 6 pour 100 sur le salaire des ouvriers. On fournirait une pension de retraite après trente ans de travail (sans condition d’âge) et une retraite proportionnelle à ceux qui, après cinq ans de versement, cesseraient leur état en France ou auraient contracté dans leur travail une incapacité de service. L’administration des caisses appartiendrait aux ouvriers. Enfin « les caisses d’un même bassin seraient centralisées et solidarisées. » MM. Chavanne et Girodet