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spectateur du dehors, mentale pour le spectateur du dedans. En premier lieu, si les idées ou images survivent dans la lutte et se conservent, c’est qu’elles enveloppent à des degrés divers des sentimens tendant à se satisfaire par tels mouvemens ; les idées sont des forces parce qu’elles recouvrent des appétits plus ou moins vagues ou précis. En second lieu, si les idées se renouvellent, c’est le plus souvent en vertu de la même force, en vertu du lien qui unit tels mouvemens à tels sentimens, et qui a établi comme conséquences dans le cerveau tels arcs réflexes, telles voies de communication toutes prêtes à recevoir les courans nerveux. La contiguïté de ces courans produit dans la conscience la similarité des impressions, et cette similarité réagit pour adapter tout le reste à sa loi. Sur ces deux premiers points, nous regrettons que M. Ribot, Comme M. Maudsley, s’en soit tenu trop exclusivement au côté physique et qu’il n’ait pas étudié l’action spontanée de la sensibilité ou de l’appétit, puis l’action réfléchie de la conscience sur la conservation des souvenirs et sur leur reproduction. Dans la conservation des idées, la conscience n’est pas un enregistrement passif, ni une reproduction des choses toute machinale. En outre, après avoir été à l’origine un simple témoin de la lutte des idées, la conscience finit par être la grande force de sélection parmi elles et tend à devenir de plus en plus dominante dans l’humanité : purement imitatrice au début, elle devient créatrice. La conscience n’est donc ni si haut ni si bas que la placent ses admirateurs ou ses détracteurs : elle n’est pas une puissance séparée et indépendante du mécanisme naturel, mais elle n’est pas non plus » un simple effet accidentel et superficiel de ce mécanisme. Si elle s’élève trop, « je l’abaisse ; » si elle s’abaisse, « je la relève. »


ALFRED FOUILLEE.