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LA MEMOIRE
ET LA
RECONNAISSANCE DES SOUVENIRS[1]

I. Th. Ribot, les Maladies de la mémoire, 2e édition. — II. James Sully, les Illusions des sens et de l’esprit. — III. Louis Ferri, la Psychologie de l’association. — IV. Herbert Spencer, Principes de psychologie. — V. Bain, les Sens et l’Intelligence. — VI. Taine, l’Intelligence, 4° édition. — VII. Ch. Richet, l’Homme et l’Intelligence.

« Considérez, dit Kant, le cerveau d’un homme, par exemple d’un savant, avec tous ses souvenirs : une puissance supérieure n’aurait qu’à dire : Que la lumière soit ! aussitôt un monde paraîtrait à ses yeux. » — Cette lumière que Kant suppose répandue à la fois sur tous nos souvenirs, nous sommes obligés nous-mêmes de la projeter successivement sur une partie, puis sur une autre, et d’éclairer peu à peu comme d’un jet de lumière quelques points de la scène intérieure, sans jamais pouvoir l’illuminer par une conscience qui l’embrasserait tout entière. Cette conscience successive et partielle de nos souvenirs est ce qu’on nomme leur reconnaissance, et c’est l’opération caractéristique de la mémoire intellectuelle. Il y a des exemples frappans de cette reconnaissance, qui se produit parfois après de longues années. Abercrombie raconte qu’une dame de Londres fut conduite mourante à la campagne ; on lui amena sa petite fille, qui ne parlait pas encore et qui, après une courte entrevue avec la mère, fut reconduite à la ville. La dame mourut quelques jours après ; la fille grandit sans

  1. Voyez la Revue du 15 mai.