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Béotie, dans les îles, les motifs que l’on avait été si surpris d’abord de rencontrer à Mycènes. Si nulle part on ne recueillit des richesses comparables à celles que renfermait, dans cette ville, le fameux cercle de pierres où avaient été ensevelis les princes de la tribu, on apprit cependant encore beaucoup en sondant le trésor des Minyens à Orchomènes, les tombes voisines de l’Héræon et de Nauplie, les tumulus de Spata et de Ménidhi. Les séries ébauchées se complétèrent et s’étendirent. D’ailleurs, comme dit le proverbe, une bonne fortune ne vient jamais seule. Nous ne saurions énumérer toutes les chances heureuses qui, dans ces dernières années, ont donné aux archéologues tant d’émotions et de joies ; il suffira de rappeler les découvertes qui ont jeté le plus de jour sur les questions d’origines et sur les plus anciens rapports de la Grèce avec l’Orient. Ici, c’était l’art cypriote qui sortait de terre tout entier, par les soins de MM. Cesnola, Lang et Ceccaldi, un art sans grâce et sans beauté, mais qui n’en intéresse pas moins vivement par tous les renseignemens qu’il fournit et toutes les pensées qu’il suggère. Là, c’étaient les explorateurs allemands d’Olympie qui, dans les couches les plus profondes du terrain, ramassaient des bronzes dont plusieurs ne sont certainement pas postérieurs de beaucoup au siècle où l’épopée a pris sa forme définitive. Ailleurs, en Italie, si les fouilles ont fait moins de bruit, le gain qu’en a tiré la science n’a peut-être pas été beaucoup moindre. À Bologne et sur tout le versant oriental des Apennins, on a trouvé une Etrurie plus étrange de formes et plus primitive que celle des vallées de l’Arno, de la Chiana et du Tibre. Dans cette dernière contrée, qui avait déjà tant produit, une plus sûre direction imprimée aux recherches a permis de mieux distinguer les périodes, de mieux marquer l’ordre dans lequel se sont succédé les influences qu’a subies la civilisation étrusque. Dans le Latium, plus d’un curieux secret a été livré par les débris des premiers villages bâtis sur l’Aventin et sur le Quirinal, ainsi que par les tombes de Préneste. Dans les décombres de ces maisons, qui ont peut-être été bâties avant la célèbre cabane de Romulus, on a recueilli ces amulettes en terre émaillée que fabriquaient l’Égypte et la Phénicie ; une sépulture latine contenait une coupe d’argent où était gravée une inscription phénicienne[1].

Veut-on savoir quelles sont les idées principales qui, sous l’effort de la discussion et de la critique, se sont dégagées des faits que nous avons rappelés et de bien d’autres moins importans en apparence ? Voici comment on peut résumer les conclusions auxquelles on se sont conduit par l’ensemble de ces découvertes et de ces observations. La civilisation dont nous sommes les héritiers est

  1. G. Perrot et Ch. Chipiez, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. III, p. 97.