Ces peuples s’acharnent les uns contre les autres, et Rome, qui se complaît à ce spectacle, prie les dieux de ne point s’en lasser.
Enfin la Germanie du nord nourrissait mal des hommes qui ne savaient pas amender leur sol. La Gaule voisine, plus riante et plus fertile, le soleil et les fruits de l’Italie et l’opulence des villes civilisées attiraient le paysan germain, pauvre et brave. Mais cette cause de migrations n’est pas la principale. Les Cimbres et les Teutons ne connaissaient pas l’Italie, et ils furent étonnés de rencontrer encore, après avoir changé de route plusieurs fois, la frontière romaine. En résumé, les Germains ont émigré parce que ces nomades d’hier n’étaient pas encore attachés au sol, parce que l’organisation propre à la vie nomade, appliquée à la vie sédentaire, ne permettait pas la croissance normale d’un peuple, parce que leur industrie principale était la guerre, parce qu’ils étaient pauvres et qu’ils étaient braves, parce qu’une nation à ses origines pratique sans fausse pudeur le droit de la force, que les nations civilisées pratiquent en le reniant.
L’extermination des Cimbres et des Teutons, en l’année 102 avant Jésus-Christ, termina la première guerre défensive de Rome contre les Germains ; la victoire de César sur Ariovisto termina la seconde un demi-siècle après. Rome donne alors à la Germanie pour frontières méridionale et occidentale, le Danube et le Rhin ; mais il était difficile de contenir les populations mobiles qui habitaient les rives des deux fleuves, d’autant plus qu’elles subissaient souvent le contre-coup de mouvemens qui se produisaient à l’intérieur ou aux extrémités de la Germanie. Rome, pour se défendre, prit l’offensive, et l’on put croire un moment que la Germanie allait être conquise par Auguste, car Drusus atteignit l’Elbe, Domitius Ahenobarbus mena les aigles au de la du fleuve, et l’administration romaine commençait à s’emparer du pays, quand Varus et ses légions périrent dans la forêt de Teutoburg, la neuvième année de l’ère chrétienne. Tibère, Drusus et Germanicus vengèrent les légions romaines, mais l’idée de conquérir la Germanie fut abandonnée.
Rome se fortifia sur les deux fleuves frontières ; elle traça un vallum du Rhin au Danube, et plaça entre elle et l’ennemi le terrain militaire des champs décumates. Elle employa tantôt la politique pour acquérir en Germanie des alliés et des serviteurs, tantôt les armes pour exterminer ou déporter un peuple qui violait le contrat d’alliance ; mais elle ne fit plus de ce côté aucun progrès durable, et bientôt les Germains reprirent l’offensive, qui