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paraissent pas disposés à tomber dans cet excès. Nous l’avons déjà dit ; l’excès n’est pas dans leur caractère ; l’esprit de mesure et de sage atermoiement leur plaît davantage ; ils lui doivent, en somme, leur unité et leur force actuelle. Il y a quelques mois, par le vote des fameuses conventions, vote que des considérations parlementaires, souvent mesquines, n’avaient que trop longtemps retardé, ils ont donné une nouvelle preuve de cette sagesse en confiant à l’industrie privée l’exécution des réseaux complémentaires des chemins de fer de la Méditerranée et de l’Adriatique. Cette mesure allégera dans de larges proportions les budgets futurs ; son adoption définitive était le corollaire indispensable du plan de M. Magliani.

Faut-il considérer ce plan comme un beau rêve sujet à plus d’une déception ? Ce point de vue pessimiste ne nous parait pas justifié. Le système de M. Magliani est fondé sur l’expérience des dernières années, sur des résultats constatés officiellement, et qui doivent nécessairement se reproduire, pour peu que les circonstances s’y prêtent et que des imprudences politiques n’y mettent pas obstacle. Les progrès accomplis sont certains. Il nous suffira de rappeler la suppression de l’impôt sur la mouture et du cours forcé, les dépenses extraordinaires soldées en majeure partie sur des ressources ordinaires, la progression des recettes normales dépassant celle des dépenses de même ordre. Pourquoi l’Italie serait-elle moins heureuse, dans des conditions aussi favorables, que lorsque les événemens et les nécessités de son élévation subite lui rendaient la tâche incomparablement plus ardue ? Pourquoi les Italiens montreraient-ils moins de sagesse, de persévérance et de résolution patriotique que par le passé ? Nous ne voyons aucun motif de le craindre, et nous sommes persuadés, au contraire, que l’avenir récompensera une série d’efforts plus difficiles, aussi glorieux et souvent plus fructueux que ceux qui préparent, sur un autre terrain, de retentissantes victoires. Inutile d’ajouter qu’il y a une liaison intime entre les succès financiers et ceux auxquels nous venons de faire allusion. Nous sommes loin de souhaiter à l’Italie l’occasion de courir ces grands hasards ; nous espérons au contraire qu’elle les évitera avec la plus rigoureuse prudence. On n’en a pas moins appris à reconnaître au dehors que les forces de ce jeune royaume, ses ressources et ses moyens d’action ont acquis des développemens qui ne permettent aucune comparaison avec le passé.


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