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Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 71.djvu/232

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



31 août.

On a si étrangement prodigué de nos jours les statues, les monumens et les apothéoses, on a répandu à flots tant de déclamations grossières ou puériles pour des gloires équivoques, pour de vulgaires renommées de parti qu’il y aurait de quoi dégoûter à jamais de ces vaines représentations données par les vivans aux dépens des morts. On dirait que plus les temps sont ingrats, plus on se plaît quelquefois à faire des grands hommes avec de petits personnages qui n’auront même pas une place dans l’histoire, et quand on va chercher dans le passé quelque célébrité universelle ; c’est pour la rapetisser à la mesure des passions ou des intérêts du jour.

Heureusement, il faut l’avouer, il y a encore honneurs et honneurs, il y a commémorations et commémorations, et il est des momens rares où le sentiment public lui-même sait bien faire la différence entre ce qui n’est qu’une banale cérémonie imaginée par l’esprit de secte, et le juste, le légitime hommage rendu à de généreux serviteurs de la France. Certes, depuis quelques années, les occasions n’ont pas manqué : on a mis des monumens partout, on a érigé des statues à tout le monde, même à ceux qui ne méritaient pas un buste on a décrété des obsèques. C’était tout au plus un objet de curiosité pour une foule souvent indifférente qui allait là comme à un spectacle, comme à une fête populaire, sans se préoccuper beaucoup du mort qu’on ensevelissait ou du grand homme coulé en bronze qui ne représentait rien pour elle. Que s’est-il passé, au contraire, ces jours derniers, au Mans et à Paris, à l’inauguration du monument élevé au général Chanzy et aux funérailles de l’amiral Courbet, ramené dans son suaire du fond des mers