province. Mais les Mérovingiens abusèrent du droit qu’ils avaient d’accepter ou de rejeter la personne de l’élu, et ils en firent une source de revenus. « Déjà, dit Grégoire, commençait à fructifier cette semence d’iniquité : le sacerdoce était vendu par les rois et acheté par les clercs. » Puis il arrivait que le roi, après avoir rejeté une élection, désignait lui-même l’évêque. D’autres fois, il le nommait sans se soucier des électeurs : Chilpéric, par exemple, disposa de sièges épiscopaux en faveur de laïques. L’église ne laissait pas toujours passer sans protester de pareilles usurpations. Un certain Ermerius, fait évêque par Clotaire, fut déposé après la mort de ce prince par un concile provincial, qui désigna pour le remplacer Héraclius. L’élu va trouver le roi Caribert et lui fait un beau discours où il ne manque pas de lui promettre un règne long et prospère, s’il observe les canons. « Ah ! tu crois, répond Caribert en grinçant les dents, que les fils du roi Clotaire ne sauront pas faire respecter les actes de leur père ? » Et il fait jeter Héraclius dans un char rempli d’épines, qui l’emmène en exil ; puis il ordonne de rétablir Ermerius et frappe d’une amende énorme les pères du concile qui l’ont déposé. Mais le plus souvent l’église se soumettait. C’était elle qui avait donné aux rois francs ce pouvoir sur elle-même. Saint Rémi ayant un jour ordonné prêtre, à la prière de Clovis, un laïque du nom de Claudius, fut blâmé par les évêques : « J’ai fait cela, répondit-il, sans avoir rien reçu pour le faire, à la demande du très excellent roi, qui est le prédicateur et le défenseur de la foi catholique. Vous m’écrivez que ce qu’il a ordonné n’est pas canonique. Remplissez votre haut sacerdoce… Le triomphateur des nations a commandé : j’ai obéi. » L’église, en effet, avait de trop grandes obligations envers les Mérovingiens pour ne pas faire leurs volontés. On l’a très bien dit : elle sentait pour ces princes, les seuls rois barbares qui fussent orthodoxes, la dangereuse tendresse d’une mère pour un fils unique.
Les rois siègent dans les conciles et les président. Un concile a été tenu à Orléans, la dernière année du règne de Clovis, et les évêques y ont été convoqués par « leur seigneur, le fils de l’église catholique, le roi Clovis. » C’est le roi qui a dressé l’ordre du jour ; à ses propositions, les évêques répondent par des décisions qu’ils soumettent à « un si puissant roi et seigneur, afin que, par sa haute autorité, il les rende obligatoires. » Les successeurs de Clovis maintiennent soigneusement les droits royaux en cette matière. Comme les évêques du royaume de Sigebert avaient voulu se réunir sans son autorisation, le roi le leur interdit, attendu qu’un « concile ne peut se tenir dans son royaume sans son aveu. » Et, de fait, les actes des conciles portent d’ordinaire la mention du « consentement, » de « l’invitation, » de « l’ordre » du roi.
Le Mérovingien a donc grande autorité dans l’église et sur