initiés, la demeure ténébreuse s’éclairera. Homère n’accordait aux morts qu’une triste condition ; Aristophane et Plutarque les verront mener gaîment leur vie d’outre-tombe sous une lumière éclatante et dans l’air le plus pur, au milieu de danses et de jeux animés par l’harmonie des chœurs. À ces plaisirs matériels qui rappellent ceux des îles Fortunées, Pindare ajoute ce qui serait pour nous la suprême récompense : « la connaissance du commencement et de la fin de la vie, » ou la science complète et toutes les joies de l’intelligence. Le Phédon donne même aux initiés, c’est-à-dire aux élus, « la contemplation des dieux, en qui ils habiteront et vivront. » On ira encore plus loin : « Quand tu auras abandonné la dépouille mortelle, disent les Vers dorés, tu t’élèveras dans l’air libre et tu deviendras un dieu incorruptible. La mort n’aura plus d’empire sur toi. » L’épitaphe d’une jeune Grecque porte même ces mots qui ne sortent plus de l’imagination d’un poète ou d’un philosophe : « Ma mère, ne me pleure pas ; à quoi bon ? Vénère-moi plutôt, car je suis devenu l’astre divin qui paraît au commencement du soir. » Au IVe siècle de notre ère, les grands païens croyaient encore que l’âme des justes remontait au ciel pour jouir d’un éternel séjour dans les astres.
Les Grecs avaient chargé un dieu, Hermès Psychopompe, de conduire les âmes aux champs Élyséens, et, par le droit d’assistance et de châtiment qu’ils reconnurent « à leurs morts, ceux-ci semblèrent participer de la divinité ; ils devinrent les auxiliaires des déités chtoniennes et furent appelés des dieux. Au temps où le polythéisme se mourait, Cicéron écrivait très sérieusement : « Nos ancêtres ont voulu que les hommes qui avaient quitté cette vie fussent mis au nombre des dieux… Rendez aux mânes ce qui leur est dû ; tenez-les pour des êtres divins ; » et lui-même voulut consacrer un temple à sa fille Tullia. Tous les tombeaux romains portaient l’invocation : Diis Manibus, et bien souvent ces mots : Sit tibi terra levis, ou mieux encore : Ave et vale. Il n’y a pas bien longtemps que, dans quelques-unes de nos provinces, au repas des funérailles, on buvait à la santé du « pauvre mort. »
Rapprochez maintenant les paroles qu’Homère prête à l’ombre d’Achille de celles que prononça Julien mourant, et vous verrez que l’hellénisme, en idéalisant peu à peu la mort, est arrivé jusqu’aux confins du christianisme.
Le culte des morts, qui ne se pratiquait qu’aux anniversaires, était la partie extérieure de la religion domestique ; le culte du