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de substances minérales dissoutes, ne sont pas assurément sans relation avec les émanations gazeuses, les accidens éruptifs, les épanchemens de basaltes en fusion qui se produisirent à la même époque et dont les traces incontestables se retrouvent, auprès d’Aix, dans ce que l’on nomme le volcan de Beaulieu, connu des plus anciens naturalistes. — Pour ce qui est de la mer, en quoi la présence du gypse en dissolution dans ses eaux implique-t-elle l’origine constamment marine de cette substance ? La mer, dans son vaste sein, renferme les résidus d’une foule de matières : toutes celles que les eaux courantes peuvent atteindre et délayer ou dissoudre s’y rendent nécessairement ; la mer ne les a pas créées pour cela ; elle les garde simplement, sauf à les rejeter, c’est-à-dire à les précipiter dans des conditions déterminées. On recule donc la difficulté en attribuant à la mer l’origine des corps qu’elle possède accidentellement, et les gypses du trias auraient été uniquement le fait d’un dépôt marin qu’il serait encore légitime de rechercher comment cette substance a pu se constituer à la surface du globe, avant d’être comprise, à titre d’élément partiel, dans ce qu’on est convenu de nommer les « eaux mères. » Au contraire, si l’on admet que les gypses lacustres tertiaires aient été le produit d’une action hydro-thermique ou géogénique, rien de plus naturel, comme on l’a souvent pensé, que de rattacher au même ordre de phénomènes la mort violente de cette foule de poissons et d’insectes qui jonchent certains lits intercalés dans les gypses. Ces animaux doivent avoir été surpris par des émanations délétères, les uns dans les eaux, les autres au sein de l’air, et entraînés ensuite au fond du lac, où un faible lit de sédiment est venu les recouvrir et les préserver.

C’est dans le cadre ainsi disposé que vient se placer une des végétations les plus curieuses, les mieux reconstituées dans ses traits essentiels, dont on ait eu connaissance à l’état fossile. La flore des gypses d’Aix compte à l’heure actuelle plus de quatre cents espèces déterminées d’après leurs feuilles, leurs fleurs ou leurs fruits, quelquefois d’après ces divers organes réunis. — L’examen patient de tous ces débris, en mettant au jour le caractère et les aptitudes des végétaux recueillis, leur fréquence relative et leur mode d’association, a révélé approximativement l’aspect de l’ancienne contrée, la nature du climat et l’ordre même des saisons qui présidaient alors au développement des plantes, et influaient par elles sur les animaux. A certains indices tirés des sédimens, tantôt vaseux ou calcaires, tantôt minces ou feuilletés, on reconnaît l’existence d’alternatives répétées dans le régime des eaux de l’ancien lac, soumis à des crues périodiques, à des délaissemens et à des