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livré aux étrangers les pierres en question. Depuis qu’on les voyait si étudiées et si convoitées, on avait fini par les regarder comme des espèces de talismans ; peut-être les signes bizarres dont elles étaient couvertes indiquaient-ils où se trouvaient des trésors qu’il ne fallait pas abandonner à ces mécréans. Alors se présenta une occasion que sut mettre à profit M. Wright, l’auteur du livre dont nous avons inscrit le titre en tête de cette étude. La Sublime-Porte, en 1872, avait été saisie d’un de ces accès de zèle qui la prennent, parfois, aux changemens de saison ; elle voulait des réformes ; après avoir longtemps cherché, elle avait trouvé, dans son haut personnel, un honnête homme, Subhi-Pacha, et l’avait nommé vali ou gouverneur-général de la Syrie. Subhi s’était mis à l’œuvre avec conscience. Il ne se contentait pas de réparer les injustices dont les victimes réussissaient, non sans peine, à porter jusqu’à lui leurs doléances ; il résolut de parcourir sa province pour aller au-devant des plaintes et pour corriger sur place les abus. M. Wright, de la Société anglaise des missions, habitait alors Damas ; le pacha l’invita, ainsi que le consul-général, M. W. Kirby Green, à être d’une tournée dont Hamath serait la principale étape. L’invitation fut acceptée avec empressement. M. Wright avait son idée. Ce fut à Homs qu’il rejoignit la cavalcade du vali. Nous lui laissons la parole pour raconter son exploit.

« Le lendemain, nous partîmes pour Hamath avec une suite très nombreuse. De toutes parts étaient accourus, avec leurs sujets, des chefs de tribu qui avaient tenu à présenter leurs hommages au pacha. On voyait galoper à travers la plaine des fils de princes ruinés, dont beaucoup ne possédaient plus, pour toute fortune, qu’un cheval de sang, une veste richement brodée et de belles armes ; ils exécutaient des voltes hardies ; ils jetaient en l’air leurs lances et les rattrapaient au vol ; ils faisaient preuve d’une merveilleuse habileté dans le maniement de leurs montures. Les otages bédouins arrachés au désert, les ulémas en longues robes et aux blancs turbans, les derviches coiffés de leurs bonnets en pain de sucre formaient un cortège qui, sur dix de front, avait une longueur de plus d’un mille.

« Le 25 novembre 1872, nous arrivâmes à Hamath. Pendant la journée, le gouverneur nous avait consultés, M. Green et moi, sur ses projets pour l’amélioration du sort de ses administrés. Nous restâmes enfermés avec lui jusqu’à une heure avancée de la soirée, et, au cours de la conversation, je lui demandai de m’aidera prendre enfin des copies authentiques de toutes les inscriptions ; il me promit son concours le plus entier.

« Le lendemain, de très bon matin, M. Green et moi, nous courions