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Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 76.djvu/326

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Il y a donc en certainement des tribus hétéennes dans les monts d’Ephraïm et de Juda, où elles touchaient ainsi aux frontières de l’Egypte. Ce qui dut commencer à les refouler vers le nord, ce fut la pression de la conquête égyptienne sous les grands pharaons thébains ; puis, lorsque les derniers Ramessides se furent renfermés dans la vallée du Nil, les Hébreux franchirent les gués du Jourdain, et, tantôt par les armes, tantôt par une lente et graduelle infiltration, ils s’établirent de plus en plus solidement entre ce fleuve et la côte que se partageaient les Philistins et les Phéniciens. Sous David et sous son successeur, ils étaient enfin devenus les maîtres incontestés de toute cette région ; ils avaient achevé de se subordonner ceux des groupes de l’ancienne population qu’ils ne s’étaient pas assimilés ; aussi la dernière mention de ces Hétéens méridionaux se rencontre-t-elle à propos des hommes de corvée que Salomon lève, en vue des travaux du temple, « sur tout le peuple qui était resté des Amorrhéens, des Hétéens, des Phéréziens, des Héviens et des Jébuséens, ne faisant point partie des enfans d’Israël, leurs descendans qui étaient restés après eux dans le pays et que les enfans d’Israël n’avaient pu dévouer par interdit[1]. »

Après ce moment, il n’est plus question, dans les annales hébraïques, d’Hétéens vivant en terre juive ; mais, en revanche, on commence à y entrevoir, par instans, sur la frontière septentrionale du nouveau royaume, des Hétéens indépendans, ceux de la vallée de l’Oronte. Ils sont trop loin de la Palestine, dont les sépare la masse de l’Hermon et de l’Antiliban, pour avoir à intervenir dans les guerres des souverains qui règnent à Jérusalem et à Samarie ; mais, au moment où l’empire juif atteint sa plus grande extension, ils entretiennent pourtant avec lui certaines relations de voisinage dont toute trace n’a pas disparu. Quelques-uns de ces princes hétéens paraissent avoir prêté hommage à David et avoir été comptés parmi ses vassaux[2]. Salomon met leurs filles dans son harem avec celles des chefs de Moab, d’Ammon et de l’Idumée, avec celles

  1. I Rois, IX, 20-21.
  2. C’est ce qui paraît résulter d’un passage où le texte hébreu (II Samuel, XXIV, 5-7) donne, à propos du dénombrement ordonné par David, une leçon inintelligible. Il y est question de Joab et des envoyés chargea de cette mission. « Lorsqu’ils eurent passé le Jourdain, ils campèrent à Aroër, à droite de la ville, dans la vallée de Gad, puis à Jazer ; ils allèrent ensuite a Galaad et dans la terre des Tahtim Hodsi, etc. » Personne n’a pu dire ce qu’étaient ces Tahtim Hodsi. Certains manuscrits des Septante, comme l’a remarqué l’abbé Vigouroux, permettent de corriger, à coup sûr, un texte altéré ; on y lit, au sujet des commissaires : « grec : Et ils vinrent à Galaad et à la terre des Hétéens de Cadès. » Il y avait dans l’hébreu non Tahtim, mais Hahitim ; le thau et le se confondent souvent dans les manuscrits (Les Héthéens de la Bible, dans la Revue des questions historiques, t. XXXI, p. 58-120.)