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presque toujours se mélange à l’excès d’acide, prend naissance. Seulement, la liqueur ne restitue plus le métal primitif radicalement transformé ; le phénomène n’est plus d’ordre purement physique. Sans nous étendre davantage sur ce sujet par trop technique, notons en passant que l’eau est violemment décomposée par certains métaux tels que le sodium ; de la soude se forme qui se dissout dans l’eau et il se dégage tumultueusement de l’hydrogène naissant. En additionnant le sodium de mercure, qui ne prend pas part à la réaction, le gaz s’échappe aussi doucement qu’on veut ; en sorte que l’amalgame de sodium est un agent « hydrogénant » ou « réducteur, » tantôt énergique, tantôt modéré, suivant sa composition. Par cela même, il est constamment employé par les savans modernes dans leurs opérations de synthèse organique.

Nous venons de prononcer tout à l’heure, à propos du bore et du silicium, le mot de métalloïde. De même qu’en littérature « tout ce qui n’est point prose est vers » et « tout ce qui n’est point vers est prose, » de même pour les chimistes tous les corps simples sont ou métalloïdes ou métaux. La première de ces deux expressions est parfaitement impropre ; elle laisserait croire que toutes les substances non rigoureusement métalliques sont par leurs caractères des quasi-métaux. Au contraire, il s’agit de matières dont les propriétés physiques diffèrent essentiellement de celles des élémens bien plus nombreux rangés dans la seconde classe, tout en variant énormément d’un terme à l’autre de la série. L’iode, l’azote, le carbone se distinguent tout autant comparés entre eux qu’opposés à l’argent ou au zinc. Ce n’est guère qu’en lisant des livres de science théorique qu’on peut se rendre compte des différences d’allure si tranchées qui séparent les deux sections au point de vue chimique. Si les caractères des différens métaux varient beaucoup en énergie, la tendance générale change médiocrement ; des divergences beaucoup plus nettes séparent les métalloïdes : les transitions sont heurtées et brusques, non-seulement de groupe à groupe, mais d’élément à élément. Mieux encore, ces capricieuses matières ne sont pas toujours identiques à elles-mêmes ; quelques-unes d’entre elles peuvent revêtir diverses formes et au changement d’aspect extérieur correspond une modification dans la nature chimique. Expliquons-nous : le gaz oxygène peut, à basse température et grâce à divers procédés, notamment par l’action de l’effluve électrique, se transformer en ozone, sans qu’il y ait, bien entendu, aucune absorption de matière. L’ozone chauffé redevient oxygène facilement, trop facilement même au gré des chimistes, et cette modification du gaz vital est douée d’une odeur sulfureuse spéciale, d’une saveur caractéristique analogue à celle du homard, au lieu que la substance