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Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 76.djvu/918

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motif que l’antimoine et l’arsenic fournissent par leur copulation avec l’hydrogène des composés bien définis et assez stables analogues aux combinaisons correspondantes de l’azote et du phosphore. Quant aux chimistes de l’école moderne, ils affaiblissent encore davantage la classe des métaux au profit de l’autre section, dans laquelle ils ramènent, outre l’antimoine, le bismuth et même l’étain sans parler d’autres corps simples moins connus. On comprend qu’ils font bon marché de certaines propriétés physiques, comme l’éclat ou la conductibilité pour la chaleur et l’électricité et, se fondant sur un caractère chimique, ils envisagent comme métalloïde tout élément dont le chlorure serait décomposé par l’eau à froid.

Laissons de côté ces arguties sans importance, pour nous occuper de la classification des métalloïdes en familles naturelles, problème abordé par Dumas, il y a une cinquantaine d’années et fort heureusement résolu par lui. Dumas rangea dans un premier groupe le fluor, le chlore, le brome et l’iode, élémens dits halogènes, s’unissant volontiers à l’hydrogène comme aux métaux, agens minéralisateurs importans, mais doués d’une affinité médiocre pour l’oxygène. Ce dernier, joint au soufre, ainsi qu’à deux matières rares, le sélénium et le tellure, constitua la seconde famille, qui comprend ainsi quatre substances simples, susceptibles d’être, selon les circonstances, comburantes ou combustibles (sauf l’oxygène, cela va sans dire) et capables de s’unir à l’oxygène, comme aux métaux et à l’hydrogène. La troisième tribu n’embrasse à la rigueur que l’azote, le phosphore et l’arsenic, mais l’antimoine et le bismuth, en dépit de certaines affinités métalliques, s’y rattachent naturellement comme appendices ; tous s’assimilent parfaitement bien l’oxygène, sauf l’azote, plus paresseux à entrer en conflit, et moins bien l’hydrogène ; de plus, avec ce dernier, ils ne fournissent que des composés basiques ou neutres, au lieu d’engendrer des acides plus ou moins énergiques, comme les corps des deux premières classes. Il restait à sérier quatre élémens, mais l’on s’aperçut qu’il fallait décidément mettre de côté, à raison de ses allures par trop spéciales, l’hydrogène, lequel avait servi de base et de comparaison. Si l’on ne trouvait point notre rapprochement trop trivial, nous dirions qu’il était « opposable » aux autres matières, comme le pouce est « opposable » aux autres doigts. Enfin une quatrième famille fut créée dans laquelle entrèrent le carbone, le silicium et le bore ; pour justifier cette division moins naturelle que les autres, il fallut invoquer, à défaut d’analogies chimiques manifestes, quelques similitudes de propriétés physiques. La vérité est que le carbone et le silicium sont réunis par des liens de parenté fort étroits mis en évidence