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Les colonies d’aliénés jouent un rôle considérable en Allemagne et, dans un curieux ouvrage, le docteur Flamm, directeur de l’asile de Pfulligen (Wurtemberg), en énumère un certain nombre auxquels il attribue de précieux avantages : guérison plus rapide par des moyens plus agréables, traitement compatible avec la liberté, bénéfices provenant du travail îles aliénés, frais moins élevés. Atscherbitz, dans la province prussienne de Saxe, se compose d’un asile central pour 150 malades et de maisons isolées pour plus de 200 ; la colonie de Beckwitz comprend trois fermes séparées, habitées par 80 femmes aliénées, qui « vivent en liberté de la vie des champs, soignant parfaitement les animaux, battant elles-mêmes les grains, se disant heureuses et contentes, » Ilten, en Hanovre, est une maison de santé pour pensionnaires, à laquelle le docteur Wahrendorf a adjoint, depuis 1869, une colonie qui contient plus de 100 malades, venus la plupart de différens asiles, « heureux de jouir d’une liberté plus grande en s’occupant à la ferme et aux champs. » Sur ce nombre on compte 20 femmes qui soignent les habits des malades, font la lessive, le ménage et divers travaux manuels. La colonie de Slup, qui forme une annexe de l’asile de Prague, a été établie pour recevoir les aliénés incurables et valides, réputés inoffensifs, et les aliénés curables déjà convalescens ou sortis de la période aiguë : à ceux-ci elle sert de transition entre l’asile fermé et la vie sociale libre. Le travail y est agricole ou industriel, suivant les aptitudes des individus. En 1874, on y comptait 250 malades des deux sexes. On a pensé aussi que l’organisation des asiles où l’on reçoit des incurables doit, sous certains rapports, différer de celle des maisons destinées au traitement des cas récens ; de là deux catégories : les hôpitaux actifs où l’on soigne les malades guérissables et les hôpitaux affectés aux aliénés chroniques ; le système d’asiles mixtes usité en France n’a réussi que dans un petit nombre de pays allemands[1].

  1. Sur les asiles de Norwège, Suède et Danemarck, on peut lire un travail du docteur Boubila dans les Annales médico-psychologiques (année 1884, 2e partie). Il y a en Norwège des asiles qui renferment 1,039 aliénés pour une population de 1,900,000 habitans ; la législation de ce pays se distingue surtout par le rôle prépondérant qu’elles attribue au médecin de l’asile et les pouvoirs étendus dont elle investit la commission de contrôle ; l’aliénation mentale y est plus grande que dans les autres états. En 1881, la Suède possédait des asiles publics avec 1,986 places ; le Danemarck, trois asiles et une clinique mentale, contenant 1,900 malades.