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la cavalerie, deux compagnies d’élite du 2e léger et deux obusiers de montagne, sur le fort de Hamza, qu’il trouva inoccupé, délabré, désarmé, mais que le maréchal Valée décida de relever sous son vieux nom turc de Bordj-Bouira. Le 31, dernier jour d’octobre, il y eut un petit engagement d’arrière-garde contre quelque trois cents Kabyles de Beni-Djead et cinq ou six cents cavaliers de Ben-Salem; du côté des Français, la perte ne fut que de deux morts et de dix ou douze blessés. Enfin, le 1er novembre, la division, suivie par quelques groupes d’Arabes qui lui tiraient de loin en loin des coups de fusil, traversa les vallées de Tisser et de l’Oued-Khadra et vint coucher au Fondouk, où elle trouva les troupes d’Alger amenées par le général Rullière à sa rencontre. Des fêtes couronnèrent cette expédition de quinze jours, qui n’avait été en quelque sorte qu’une promenade triomphale. Le duc d’Orléans réunit dans un vaste banquet, sur l’esplanade de Bab-el-Oued, le 5 novembre, tous ceux qui, sans distinction de grade, avaient passé avec lui les Biban. A la fin du repas, monté sur une table, il fit à ses compagnons d’armes des adieux pleins de cordialité, de chaleur et de bon espoir, et, le lendemain, il s’embarqua pour la France.

Le 19 novembre, à Paris, le maréchal Soult, président du conseil, écrivait au maréchal Valée : « c’est un beau mouvement stratégique, militaire et politique au plus haut degré, que vos savantes combinaisons ont mis le prince royal à même d’exécuter sous votre direction. Je me garderai bien de dire que, de votre part, il y a eu de la témérité ; non, sans doute, il n’y a eu que justesse de calcul, science consommée et assurance de succès. Aussi ce succès a été complet et a surpassé tout ce qu’on pouvait attendre de vous, monsieur le maréchal, de la présence du prince et de vos vaillantes troupes. C’est un beau titre de gloire que celui d’avoir écrit, après les Romains et les dix-huit siècles qui nous en séparent, cette page d’histoire, et d’avoir fait pénétrer les Français dans ces pays par des passages que les anciens maîtres du monde n’avaient pas osé franchir. »

Le 19 novembre, en Algérie, la Métidja était depuis dix jours en proie aux incursions des Hadjoutes. Le 10, le commandant Raphel, du 24e de ligne, attiré dans une embuscade par le caïd El-Bechir, le plus habile chef de ces hardis cavaliers, y était tombé mort. Le 13 et le 16, des coups de feu avaient été tirés sur la ville et sur les camps de Blida. En même temps, une sorte d’aspiration du dehors faisait rapidement le vide parmi les tribus de la plaine ; en dépit des postes retranchés, des redoutes, des blockhaus, les douars disparaissaient comme le poisson s’échappe entre les mailles élargies d’un filet trop lâche. Le 20, jour néfaste, de l’est, du sud, de l’ouest.