reculé ! Tout au plus suggérait-il un peu sournoisement à la commission l’idée de prendre elle-même la responsabilité de ce qu’il ne pouvait considérer que comme une irrégularité ; il avouait même assez naïvement qu’il tenait à exprimer ses scrupules pour se mettre en régie avec le sénat. De là explosion nouvelle d’indignation et de colère dans la commission, rupture éclatante, défis, guerre déclarée. On ne savait plus où l’on en était, s’il fallait refuser les crédits au risque de provoquer une crise ministérielle, s’il fallait les accorder au risque de se démentir.
Eh ! assurément, toute cette déplorable et burlesque histoire n’est qu’un tissu d’irrégularités. On est en pleine fantaisie ! La chambre elle-même, guidée par d’étourdis réformateurs, commettait plus qu’une irrégularité en supprimant capricieusement des allocations nécessaires, en jetant le désordre dans un grand service public. M. le ministre des finances, à son tour, s’est évidemment mis dans l’irrégularité en gardant des employés pour lesquels il n’avait plus de crédits, qu’il ne pouvait payer qu’en disposant par un acte discrétionnaire des fonds de l’état. C’était irrégulier, c’était confondre toutes les règles financières de prétendre remplacer ou rétablir indirectement des dotations permanentes supprimées par la voie des crédits supplémentaires, qui ne sont pas inventés pour cet usage. C’était encore et toujours irrégulier de prendre dans un chapitre du budget pour subvenir à un autre chapitre ou d’escompter arbitrairement des annulations de crédit qui sont une opération prévue, réglementée, soumise à des conditions déterminées. Tout est irrégulier, et rien de semblable ne serait arrivé si, dès le premier moment, M. le ministre des finances et M. le président du conseil, allant au combat sans hésitation, avaient mis la chambre en présence de la faute qu’elle allait commettre, s’ils avaient résolument décliné d’avance la responsabilité de la désorganisation des services publics. En louvoyant, ils n’ont réussi qu’à tout compliquer, à créer cette situation diminuée où la chambre, cédant à la nécessité, vient de rétablir par un vote tardif les crédits qu’elle avait supprimés, et où le ministère, même victorieux, ne reste pas moins ce qu’il est, avec son système perpétuel de faiblesses et d’équivoques.
On croit bien habile d’esquiver la lutte, d’écarter un danger du moment en négociant avec toutes les prétentions, avec toutes les fantaisies ; c’est l’éternelle tactique, et on ne fait que se préparer de plus graves difficultés ou une irrémédiable impuissance. Qu’il s’agisse des finances ou de toutes ces réformes louches, douteuses, décousues qui ne cessent de se multiplier, on procède toujours de même : on livre une partie de l’administration publique en essayant de sauver l’autre partie, qui n’est pas moins désorganisée. C’est le dernier mot de ce qui nous reste de gouvernement. M. le président du conseil, qui a sans doute certaines qualités, est lui-même invariablement la dupe de ses