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l’empereur a nommées pour les conférences auxquelles Sa Majesté m’ordonnera de me rendre dès qu’elle sera informée que Sa Majesté Impériale aura résolu que vous y veniez aussi, seulement pour signer le traité général et solennel avec l’empereur et l’empire, après que les plénipotentiaires auront tout réglé. Je suis ravi d’espérer l’honneur de vous y revoir. Le roi a nommé M. de La Houssaye, conseiller d’état, et M. le comte du Luc, son ambassadeur en Suisse, pour seconds ambassadeurs plénipotentiaires.

J’ose me flatter, monsieur, par l’amitié dont vous m’honorez, que vous apprendrez avec quelque joie les grâces que je reçois en ce moment de Sa Majesté : celle des grandes entrées, d’autant plus distinguées que le seul M. le duc de Lauzun, qui en a été honoré il y a quarante-cinq ans, et moi, sommes les seuls qui les ayons actuellement. Le roi a bien voulu aussi donner la survivance du gouvernement de Provence à mon fils. Je n’oublierai pas, monsieur, de vous rendre compte que lorsque j’ai eu l’honneur de présenter vos respects à Sa Majesté, elle a parlé de vous avec toute l’estime que vous méritez et pouvez souhaiter.


Eugène et Villars ne prirent pas part directement aux conférences de Bade. Ils ne s’y montrèrent que pour la formalité finale. Lorsque tout eut été convenu entre les plénipotentiaires du roi et de l’empereur, en présence des envoyés des princes de l’empire, lorsque le traité eut été dûment mis en latin diplomatique, les deux ambassadeurs furent invités à venir le signer ensemble. Une difficulté d’étiquette faillit encore tout remettre en question. Villars était arrivé dans la petite ville de Bruck, à trois lieues de Bade, lorsqu’il fut informé que le texte du traité accordait à Eugène, comme prince de maison souveraine, la qualification de altissimus, tandis qu’il ne lui donnait à lui qu’une épithète moins retentissante. Il déclara tout net qu’un maréchal de France, duc et pair du royaume, valait bien un prince étranger, et que, si la moindre différence était établie entre eux, il retournerait immédiatement sur ses pas. Eugène, prévenu par un courrier spécial, s’empressa de lever la difficulté en acceptant de bonne grâce l’égalité complète. Le 7 septembre, les deux ambassadeurs, réunis dans l’hôtel de ville de Bade, signèrent, en grande cérémonie, le traité définitif.

On sait que le congrès de Bade n’avait pas tenu tout ce qu’on en attendait. Effrayés de la masse des réclamations produites, du temps qu’il aurait fallu pour les étudier, les discuter, en concilier les effets contradictoires, les plénipotentiaires les avaient toutes ajournées de nouveau, pour s’occuper du seul intérêt pressant, le rétablissement de la paix générale. Ils s’étaient donc contentés de