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autel où étaient étalés les pains azymes, un éphod, un trésor d’objets consacrés et surtout un sacerdoce nombreux qui avait soin du sanctuaire et en vivait. David, dans une course qu’il fit de ce côté avec ses gens, s’adressa au chef des prêtres, qui s’appelait Ahimilik, et lui demanda du pain pour sa troupe. Ahimilik, n’ayant pas de pain commun à lui donner, crut pouvoir passer sur les règles liturgiques. Il offrit à David, pour lui et ses gens, les pains consacrés qui étaient devant l’autel, à condition cependant qu’il affirmât que ses gens étaient purs de tout commerce avec les femmes. David demanda ensuite à Ahimilik s’il avait des armes ; le prêtre répondit : « Il y a l’épée du Philistin Goliath; la voici enveloppée dans le manteau, derrière l’éphod. Si tu veux la prendre, prends-la, car il n’y en a pas d’autre ici. » Et David dit : « Elle n’a pas sa pareille; donne-la-moi. » Ahimilik consulta, en outre, son éphod pour David ; la sympathie, en un mot, fut complète entre David et les prêtres de Nob.

Tout cela fut rapporté à Saül par son intendant l’Édomite Doëg, homme jaloux et méchant. Le roi fit venir à Gibéa Ahimilik et sa famille. Ahimilik défendit David avec beaucoup de modération. Tout fut inutile : Saül ordonna de mettre à mort les prêtres de Nob. Les racim israélites refusèrent de procéder au massacre ; il fallut recourir à Doëg pour l’exécution. Selon la légende, tous les prêtres furent tués, et Nob fut détruit ; un seul fils d’Ahimilik, nommé Abiatar, s’échappa et se sauva auprès de David. Ce qui est probable, c’est qu’Abiatar était resté à Nob et qu’à la nouvelle du meurtre de son père et de ses frères, il alla rejoindre David. Il portait, en effet, l’éphod avec lui ; or il n’est pas probable que la troupe sacerdotale eût pris l’ustensile sacré, quand elle vint trouver Saül après la dénonciation de Doëg.

L’oracle de Iahvé, ainsi tombé entre les mains de David, lui rendit de signalés services. Le bruit s’étant répandu que les Philistins attaquaient le village de Quéila et pillaient les aires, David consulta Iahvé pour savoir s’il devait se porter sur Quéila. La réponse fut favorable. David marcha, malgré l’avis de ses compagnons, et réussit complètement. Il commit seulement une imprudence en entrant, avec une poignée d’hommes, dans une ville fermée. C’est une faute que les brigands bédouins évitent de faire, sachant qu’ils perdent tous leurs avantages dans les villes. Saül vit la maladresse et résolut, par un coup de main rapide, d’enlever David. La question pour celui-ci était de savoir si les gens de la ville le livreraient à Saül. L’oracle ne lui laissa aucune illusion à cet égard. Il se hâta donc de quitter Quéila avec ses six cents hommes ; puis il gagna le pic de Hakila et la partie boisée du désert de Ziph,