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une large bande de terrain, ont permis de construire sur le devant de la ville toute une ligne de maisons, de magasins, d’entrepôts, mis en communication, soit entre eux, soit avec les navires, par un chemin de fer continu. Son mouvement commercial, qui était de 53 millions il y a cent ans, était de 221 millions en 1881 ; il s’est encore accru depuis cette époque. Il croîtrait beaucoup plus vite, si l’Asie-Mineure avait des chemins de fer. Elle n’en a que des embryons: celui de Moudania à Brousse, en Bithynie, est très court et fonctionne aussi mal qu’il est possible. Ceux de Smyrne à Aïdin et à Alachéir ne sont que des têtes de ligne, attendant leur prolongement vers la Cappadoce et l’Euphrate. Sardes, qui est à l’est de Smyrne, fut autrefois une ville aussi importante que Vienne ou Berlin. Elle pourra le redevenir quand elle tiendra d’une part à Smvrne et de l’autre aux grands fleuves de Mésopotamie par un vrai chemin de fer. On verra alors se décupler les produits du Levant, et leur exportation en Europe et en Amérique. En retour, l’importation en Asie-Mineure des produits européens grandira d’année en année, jusqu’au jour encore lointain où le sol et le sous-sol de l’Asie seront bien exploités et leurs produits naturels manufacturés sur place.

Aujourd’hui, la seule industrie locale est la fabrication des tapis. On les tisse sur plusieurs points de l’Anatolie et on les exporte sous le nom de tapis de Smyrne, parce que cette ville en est le principal, sinon l’unique marché. La grande Asie fournit depuis quelques années à l’Europe des tapis de couleur éteinte et de grosse laine, qui ont encore du succès; mais, quant à la perfection du travail, au coloris et à la qualité, ils n’approchent pas de ceux de Smyrne. Cette ville en expédie chaque année au dehors pour 3 millions de francs.

Tout le reste des objets exportés consiste en produits naturels ou à peine transformés par le travail de l’homme. Ce sont : les céréales, surtout l’orge expédiée dans les pays du nord pour la fabrication de la bière ; — Les raisins secs pour celle du vin ; la France seule, qui en achetait pour 642,000 francs en 1873, en a pris en 1880 pour 14 millions; depuis cette époque, la vente a varié proportionnellement à la marche des maladies de la vigne ; — Le coton, dont la province produit pour 6 millions ; — Le sésame et son huile, pour la même somme ; — L’huile d’olive, dont la production s’élève à 9 millions;— Les figues, dites de Smyrne, exportées pour 2 millions 1/2; — Les laines, les peaux, les éponges dites du Levant; — Enfin huit ou neuf autres produits secondaires fournis par des arbres ou des plantes de culture facile.

On remarquera que parmi ces objets d’exportation il ne se trouve ni un métal, ni un minerai, ni même un marbre. La province en