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cryptogames ou plantes inférieures; la période secondaire ou « ère mésophytique, » pendant laquelle les gymnospermes, c’est-à-dire les conifères et les cycadées, obtiennent la prépondérance, tandis que les arbres « feuillus » sont encore absens ; enfin, la période tertiaire ou « néophytique, « nommée encore « angiospermique, » à cause de la présence des plantes supérieures et en particulier des arbres « feuillus, » qui apparaissent alors pour la première fois, dont l’essor se prononce rapidement et dont l’introduction, non encore expliquée, accroît dans une mesure jusque-là inconnue la richesse et la variété du monde végétal.

La dernière de ces trois périodes, qui débute avec la craie et se prolonge sous nos yeux, n’est pas seulement caractérisée par l’apparition et l’extension des plantes supérieures, mais elle coïncide encore avec les premiers indices du refroidissement polaire et de la décroissance de plus en plus marquée de la température terrestre, en raison directe de la latitude. Cette décroissance graduée de l’équateur au pôle succède à l’uniformité première et ne cesse, dès lors, de se prononcer toujours plus d’âge en âge. Sans vouloir chercher l’explication cosmique d’un phénomène encore inconnu dans sa cause génératrice, qui n’a cessé de s’étendre depuis son origine, et qui est sans doute destiné à ne pas s’arrêter dans l’avenir, il est impossible de ne pas en tenir compte à titre de fait. Ce fait, d’abord à peine sensible, puis graduellement accentué, a exercé son influence à l’intérieur du cercle polaire avant de propager son action au-delà, jusque dans la zone tempérée actuelle, longtemps chaude, puis tiède, alors que les alentours du pôle étaient déjà sensiblement refroidis. Il est certainement remarquable d’observer la relation qui paraît exister entre le début et la marche de l’abaissement climatologique des régions du nord et les progrès de la végétation, qui se complète parallèlement. effectivement, elle ferme le cycle entier de son évolution définitive par l’adjonction des « angiospermes, » c’est-à-dire des plantes les plus parfaites, et la prépondérance est acquise rapidement à cette catégorie, dans la mesure même des progrès du refroidissement des régions arctiques. Ces régions paraissent réellement avoir été exemptes jusque-là des rigueurs d’une saison froide, soustraites par cela même aux effets du repos hibernal, qui n’aurait été imposé aux plantes de la zone boréale qu’à partir d’une certaine date.

Ce qui est certain, c’est que le règne végétal, alors seulement qu’il vient d’acquérir tous les élémens dont il est encore composé sous nos yeux, et qu’il ne lui reste plus qu’à achever de les perfectionner, commence à se distribuer en associations ordonnées selon la latitude ; et ce mouvement une fois inauguré, on voit s’accentuer