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trouverait engagée. Or les baissiers berlinois précipitaient le rouble à marks 162.50 (francs 203.12) et le 4 pour 100 russe 1880 à 76 francs, au moment même où la Russie donnait clairement à entendre qu’elle ne rechercherait que par des moyens diplomatiques à obtenir la solution de la question bulgare.

C’est dans cette situation que les marchés financiers ont été surpris par l’annonce de la mort de l’empereur Guillaume. Les fonds publics n’en furent nulle part affectés. La Bourse resta fermée à Berlin; mais à Vienne, aucune velléité de baisse. A Paris, la rente se releva de quelques centimes. Le fait accompli était sans effet sur la spéculation.

Le nouvel empereur Frédéric III ayant heureusement accompli son long voyage de San-Remo à Charlottenbourg, et ses premiers actes, la proclamation et le rescrit au prince de Bismarck, ne démentant nullement l’opinion favorable qui régnait partout en Europe touchant les intentions libérales et pacifiques du nouveau souverain, les acheteurs s’enhardirent, et une nouvelle avance de la plupart des fonds d’états témoigna de la confiance avec laquelle le public financier considérait sur toutes les places les perspectives de l’avenir au moins le plus rapproché.

Notre 3 pour 100 s’est avancé jusqu’à 82.82, l’amortissable à 85.90, le 4 1/2 à 106.80, le rouble à 165, le Russe à 77 1/4, le Hongrois à 77 3/4, l’Extérieure à 67 3/4, le Portugais à 59 1/4, le Turc à 14.25, l’Unifiée à 386.25. L’Italien a été, de son côté, élevé à 94.25, sur la nouvelle que le gouvernement italien venait de faire parvenir au cabinet français, au sujet du traité de commerce, des contre-propositions représentant une réelle avance sur le terrain de la conciliation.

En ce qui concerne nos affaires intérieures, la Bourse n’a eu que de faibles sujets de préoccupation. La chambre, après avoir fait le grand effort de doubler ses séances pendant quelques jours, est arrivée péniblement au terme de l’examen du budget des dépenses. Il lui reste à voter le budget des recettes, et le sénat peut enfin aborder la tâche que lui impose la constitution. Il est clair qu’il ne pourra l’achever dans les délais voulus. Dans moins de trois semaines, on aura épuisé les trois douzièmes provisoires votés à la fin de 1887, et il faudra vraisemblablement en voter deux autres.

Bien que cette impuissance de nos chambres à constituer un budget soit passablement humiliante pour notre pays, la Bourse ne s’en émeut guère, non plus que des élections partielles et du plébiscite en miniature auquel elles ont donné lieu, ou que des chances d’une prochaine crise ministérielle.

Les capitaux sont toujours très abondans, et la cote des obligations, qui restent au premier rang des valeurs de placement, en fournit la preuve indéniable. Les obligations de nos grandes compagnies de chemins