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contre ces nouvelles études. Nous devons les signaler et les apprécier, pour fixer, autant que possible, les principes de la question.

On fait remarquer d’abord que la psychologie physiologique n’est pas encore une science faite, une science constituée. Ce n’est, dit-on, qu’un amas confus de faits douteux et d’opinions arbitraires : ce n’est qu’un ensemble d’hypothèses qui n’a point du tout l’autorité de la science, et qui, par conséquent, n’a pas droit à l’enseignement. Examinons cette difficulté. Qu’il y ait encore dans la psychologie physiologique beaucoup de conjectural et d’arbitraire, je le crois, et l’on s’est un peu trop hâté de pousser aux conclusions et à la doctrine ; mais qu’il n’y ait pas là de faits certains, un certain nombre de lois positives, et, en tout cas, des recherches légitimes, c’est ce qui me paraît suffisamment réfuté par le résumé précédent. Il y a donc là une science à l’état naissant, une science en voie de formation. Or la question est de savoir si une telle science doit être enseignée. Eh bien ! loin de voir là une objection, j’y vois au contraire une raison de plus. C’est surtout une science naissante qui a besoin d’être enseignée. C’est ainsi qu’avec beaucoup de raison on a créé récemment à la faculté des sciences une chaire de microbiologie, quoique ce soit là une science née d’hier, qui change de jour en jour, de telle sorte qu’entre une leçon et une autre, le professeur peut se trouver en présence de faits inattendus qui le détermineront à modifier ses assertions. Et, cependant, on a eu grandement raison de fonder une telle chaire ; car s’il est quelqu’un qui désire s’occuper de cette science et travailler à ses progrès, où voulez-vous qu’il s’y prépare ? Il en est de même en psychophysiologie. Supposez un jeune savant, philosophe ou physiologiste, que ces sortes d’études attirent et qui voudrait s’y consacrer : où peut-il donc apprendre les élémens de cette science, je vous prie ? Elle est dispersée dans des milliers de volumes de philosophie et de médecine, eu elle est mêlée à tout autre chose. Rien que de dépouiller ces ouvrages est un travail infini. Ajoutez que ces livres ne sont pas toujours faciles à se procurer, qu’on ne les possède jamais tous à la fois dans sa bibliothèque, qu’ils sont souvent écrits en langue étrangère, en anglais, en allemand, en italien, et qu’on ne sait pas toutes les langues. De plus, souvent les faits les plus importais ne sont pas dans des ouvrages, mais dans des mémoires d’académie, dans les recueils des sociétés savantes, dans des brochures éparses ; et tout cela sans lien, sans unité, sans méthode. Comment s’y reconnaître sans un guide, sans un fil conducteur ? Tel devra être l’objet de la chaire créée. On devra mettre les élèves au courant de la science telle qu’elle est actuellement, grouper, coordonner ces recherches, indiquer la bibliographie, en un mot