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la naturalisation de la moitié des étrangers engagés dans l’armée. L’autre moitié devait être congédiée et remplacée par des cantonistes pris en plus grand nombre à la conscription. Sous Frédéric le Grand, le recrutement par le système cantonal prenait un homme sur 54 de la population. Suivant la commission instituée en 1798, l’enrôlement d’un homme sur 66 devait suffire, alors, pour se dispenser des mercenaires étrangers. Mais les généraux Blücher et Scharnhorst se prononcèrent avec énergie contre les exemptions trop nombreuses accordées par le recrutement cantonal. Ce système avait fait son temps. Il n’était plus compatible avec le principe d’égalité posé comme base d’une vraie armée populaire. Les Mémoires de Blücher, Gedanken über die Formirung einer preussischen National-Armee, présentèrent des argumens décisifs pour l’abandon du recrutement cantonal. Contre le remplacement avec la conscription en vigueur en France, Scharnhorst présenta, en 1807, son vorlaüfigen Entwurf der Organisation der bewaffneten Macht. Fichte soutint, dans sa chaire de philosophie, les idées des deux généraux sur l’organisation de toute la nation armée par les Reden über den Begriff des wahrhaften Krieges. Lors du soulèvement des Espagnols et des Tyroliens contre la domination française, la Prusse se décida pour le landsturm ou levée en masse. A la date du 17 mars 1813, le roi lança l’appel pressant : « A mon peuple, » qui créa l’armée territoriale, après la formation de nombreux corps de volontaires. Le peuple entier accourut sous les drapeaux, et la patrie allemande fut délivrée. Entre deux invasions en France, l’armée prussienne reçut l’organisation qui faisait dire à son chef le plus illustre : « Chez nous on ne sait pas où le citoyen finit et où le soldat commence. »

Quel est le nombre de soldats dont l’empire allemand dispose dans les conditions actuelles et à combien s’élève l’effectif de son armée ? Actuellement, l’effectif de présence sous les drapeaux, fixé par la loi du 11 mars 1887, compte 468,409 hommes, non compris les engagés volontaires, pour l’ensemble des différens états de l’Allemagne, pendant une durée de sept années, à partir du 1er avril 1887. L’article 63 de la constitution de l’empire, cité plus haut, attribue bien à l’empereur la fixation de l’état de présence, comme la distribution des contingens de l’armée impériale. Mais, selon la remarque de M. Laband, dans son traité classique sur le droit public de l’empire (Staatsrecht des deutschen Reichs), c’est la loi militaire du 2 mai 1874, dite du septennat, votée par le Reichstag, qui détermine les linéamens et les principes d’une organisation subordonnée à l’établissement du budget pour l’armée. Le budget pour l’entretien de l’armée dépend de l’acceptation du parlement, et le