Roumanie à Vienne, qui disait, il y a quelques années, que M. Bratiano périrait étouffé par la corruption, qu’il « tomberait du pouvoir au milieu de sa majorité docile. « Les autres ministres sont M. Majoresco à l’instruction publique, le prince Alexandre Stirbey aux travaux publics, M. Baruzzi à la guerre. Le nouveau ministère naît assurément dans des conditions difficiles. Il a devant lui dans le parlement une majorité composée des amis de M. Bratiano et une opposition impatiente qui lui demande avant tout des élections nouvelles. Il n’a pour le moment à offrir que de l’honnêteté, de bonnes intentions et de la modération. C’est ce qu’on pourrait appeler un ministère de conservateurs libéraux. Sa politique intérieure se résume tout entière dans un grand désir d’apaisement ; mais il reste une question bien autrement délicate, qui a son rôle dans les récentes agitations de la Roumanie : c’est la politique extérieure, où la responsabilité royale semble assez dangereusement engagée… Par sa naissance, par son esprit de famille, par ses inclinations, le roi Charles est évidemment resté tout Allemand. Les liaisons récentes du cabinet de Bucharest avec Berlin et Vienne sont sûrement son ouvrage. Or c’est précisément cette politique qui répugne le plus au sentiment du pays. Les Roumains veulent bien garder leur indépendance vis-à-vis de la Russie, ils ne veulent pas se compromettre pour d’autres avec elle, ils ne veulent pas surtout se livrer aux Allemands, aux Autrichiens, aux Magyars. Le nouveau ministère de Bucharest aura-t-il la volonté ou le pouvoir de dégager la politique roumaine, de la ramener à l’indépendance désirée par le pays ? Ce n’est point, certes, sans importance dans un moment où toutes ces questions orientales qui se tiennent, à commencer par la question bulgare, peuvent être agitées encore par la diplomatie ou par les armes sur les bords du Danube.
CH. DE MAZADE.
La première quinzaine d’avril a été fertile en incidens, et l’on ne saurait s’étonner que la Bourse ait fini par perdre cette sérénité