Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 87.djvu/331

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en tirer profit; néanmoins, l’instruction ne devant jamais se borner à l’étude des langues, les conditions de l’enseignement scientifique dans tous les cas demeurent absolues.

On ne saurait, en ce moment, trouver bien utile un historique des phases qui se sont succédé dans l’enseignement scientifique des collèges. Il suffira de rappeler quelques incidens. A l’École normale supérieure, les élèves de la section des sciences, après deux années d’études communes, se partageaient pour la dernière année en trois catégories. Les uns adoptaient les sciences mathématiques, les autres les sciences physico-chimiques, les autres les sciences naturelles. Ils étaient libres dans leur choix, l’agrégation pour les jeunes professeurs de lycée répondant à chacune des divisions. En l’année 1858, il y eut parmi les élèves de l’École normale un peu d’entraînement pour les sciences naturelles. Pareille tendance ne fut pas goûtée dans certaines sphères. Vite on décida que l’agrégation des sciences naturelles serait confondue avec l’agrégation des sciences physico-chimiques; — C’en était fait de l’enseignement de l’histoire naturelle dans les lycées. Pendant plus de vingt ans, tout sommeille, on se dispense de donner aux élèves les moindres notions sur les sujets qui touchent d’une façon tout intime l’existence de l’homme, la végétation et le monde animal, le plus simple aperçu des phénomènes de la vie. On put constater une infériorité manifeste des nouvelles générations sur celles qui les avaient précédées.

Dans un temps où les sciences ne cessent d’apporter à l’humanité de nouvelles grandeurs dans l’ordre intellectuel, de nouveaux bienfaits dans l’ordre matériel, il semblait qu’on cherchait à en désintéresser la nation. C’était trop extraordinaire pour qu’on n’en revînt pas un jour à des idées mieux en rapport avec tous les intérêts du pays. A l’école primaire, des membres du corps enseignant s’efforçaient d’introduire quelques élémens d’histoire naturelle. En 1872, le ministre de l’instruction publique, M. Jules Simon, adressait aux proviseurs une circulaire restée fameuse. Le ministre proclamait la nécessité de réformes successives. Il prescrivait dans nos lycées les exercices de gymnastique, l’étude des langues vivantes et de la géographie. Il formulait la volonté d’apprendre aux élèves à beaucoup voir, et déjà recommandait les promenades où l’on fait une herborisation, où l’on visite une usine, un monument historique, un champ de bataille. Dès l’année 1869, d’anciens élèves de l’École polytechnique s’étaient concertés en vue d’une amélioration dans l’enseignement secondaire. L’école Monge dut répondre à cette pensée[1]. On allait prendre pour base de

  1. Cette école est dirigée par M. Godard.