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furent chantées en grande solennité : à Sainte-Marie-Majeure, à Saint-Pierre, à Saint-Paul. Le dimanche, Charles dîna au Latran, à la table apostolique. Le mercredi, les grands de Rome et de l’armée franque se réunirent à Saint-Pierre. Auprès du corps de l’apôtre, le pape et le roi s’entretinrent longtemps « face à face. » Hadrien u pria, avertit, exhorta.» Le moment était venu, dit-il, d’exécuter dans sa plénitude la promesse faite par le roi Pépin. Charles se fit relire la « page de donation ; » il l’approuva et en dicta une autre qu’il signa et fit signer par ses évêques, ses abbés, ses ducs et ses comtes. Son notaire écrivit ensuite un second exemplaire. Un des exemplaires fut remis au pape ; l’autre, déposé par Charles dans le tombeau.

L’histoire de cette donation, dont le texte est perdu, est très obscure, mais Charles semble avoir promis plus que son père : Hadrien avait obtenu u la dilatation de sa province. » Du reste, il n’avait pas attendu l’entrevue de Rome pour procéder à des annexions. Au commencement de 774, le duché de Spolète était en révolution. Une foule d’hommes de toutes les cités du pays accoururent auprès du pape, se jetèrent à ses pieds et le supplièrent par trois fois de recevoir « le duché au service de saint Pierre. » Le pape consentit, reçut les sermens, et fit élire par ses nouveaux sujets un duc qu’il établit dans sa dignité. Le Spolétin était donc « au pouvoir de saint Pierre » quand fut rédigée la donation. Cet acte reconnut le fait accompli, et à Spolète ajouta Bénévent, d’autres provinces encore.

Hadrien se crut alors le maître d’une grande partie de la péninsule, le roi d’un royaume italien ; mais, hélas ! la désillusion vint vite. Avant qu’une année se fût écoulée, le pontife s’aperçut que Charles et lui ne s’entendaient pas. Il ne reçut point Bénévent, et il perdit Spolète. Sa correspondance nous fait assister aux émotions de sa déconvenue. Pendant toute l’année 775, il attend Charles, qui a promis sa visite pour la mois d’octobre. Il espère que le roi viendra « pour augmenter et exalter sa mère la sainte église. » Il prie Dieu d’affermir « dans la poitrine fleurie » du guerrier la résolution de donner enfin « le fruit copieux de ses promesses. » Il insiste sur l’idée que l’église doit être «beaucoup plus exaltée. » Charles ne vient pas. Il se contente d’annoncer l’envoi de ses missi. Hadrien les attend pendant tout le mois de septembre, tout le mois d’octobre, tout le mois de novembre. Enfin, ces messagers sont en route. Le pape leur envoie une escorte et des chevaux à Pérouse, mais ils vont d’abord à Spolète, puis à Bénévent, en évitant Rome. « Qu’est-il donc arrivé? » demande Hadrien, qui est très anxieux. Des nouvelles inquiétantes lui arrivent de la cour franque. Des