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Les fumigations d’encens étaient aussi un rite qui ne pouvait guère se développer que dans un sanctuaire fermé. Il était naturel que la maison du dieu fût remplie d’une bonne odeur, comme la maison des rois, et que, par conséquent, il s’y trouvât un réchaud pour y brûler des parfums. Cela était d’autant plus nécessaire que la cella, humide et presque sans fenêtres, devait terriblement sentir le renfermé.

Il est hors de doute que le peuple n’entrait jamais dans le debir. On s’imagina vite que les prêtres eux-mêmes s’interdisaient d’en franchir le seuil hors certains cas solennels. Un culte plus froid ne saurait guère se concevoir. A quoi, par exemple, servaient les candélabres dans une salle qui ne pouvait guère être visitée de nuit que par les chauves-souris ? Au fond, la construction du temple amena dans le culte très peu de modifications. Ces processions, ces liturgies variées, qui donnaient tant d’éclat aux sanctuaires de l’Egypte, restèrent inconnues en Israël. Le sacrifice continua d’être, comme au temps patriarcal, l’essence de la religion, et sans doute le rite n’en fut pas changé. Les sacrifices se passaient, comme toujours, en plein air. L’autel du temple était un bama entre tant d’autres, à portée du roi et de la cour. L’idée ne vint pas un moment que ce bama supprimât les autres bomoth ; cette idée-là mettra encore près de quatre cents ans à mûrir.

Les sacrifices d’animaux nécessitaient une vaisselle d’airain considérable. C’était la principale richesse des temples phéniciens. Le temple de Salomon égala sûrement sous ce rapport les plus riches sanctuaires du temps. Tous les travaux de ce genre furent mis sur le compte d’un certain Hiram, homonyme du roi ou des deux rois de Tyr contemporains de Salomon. La légende le suppose issu du : mariage d’un Tyrien avec une veuve nephtalite, et semble dire qu’il se forma à l’école de son père dans l’art de travailler les métaux. Salomon l’aurait fait venir et lui aurait confié ses travaux d’airain.

Tout l’outillage de bronze, œuvre censée de Hiram, fut l’objet d’une universelle admiration. L’imagination s’exerça principalement sur le grand bassin d’airain qu’on appelait Iam mousaq, « la mer fondue. » C’était une énorme vasque, aux rebords labiés comme ceux d’une coupe en forme de nénuphar, décorée d’oves et portée sur douze bœufs, répartis en quatre groupes de trois, se présentant de front. On peut se figurer la forme de la vasque par la cuve d’Amathonte, au musée du Louvre. L’appareil était placé devant l’entrée du temple, à gauche en entrant, non loin de l’autel des sacrifices. C’était le réservoir central de l’eau nécessaire au service du temple. Les esclaves du temple le remplissaient et y puisaient au moyen de seaux, en montant sur des marchepieds.