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le sont actuellement, eussent pu donner de très riches produits. Les deux savans allemands sont persuadés que le naphte existe en abondance dans les massifs montagneux compris entre Schuster et Gisakan. « Plus on reconnaît, disent-ils, que les sources de pétrole de la Pensylvanie ne sont rien moins qu’inépuisables, plus ressort l’importance de cette vaste région naphtifère, car elle rendrait la Perse indépendante de la Russie, à l’époque où, le contingent de l’Amérique étant épuisé, le naphte de Bakou menacerait de devenir maître absolu des marchés du monde. »

Il est très probable que les gîtes de pétrole sont également fréquens dans les régions situées au sud de la Perse, notamment dans celles traversées par le Tigre et l’Euphrate, — la Babylonie des anciens, — car il y a déjà environ dix-huit siècles que Diodore de Sicile y signale la grande abondance de ce qu’il appelle poix de terre. Il représente les sources qui fournissent cette substance comme inépuisables, car elles ne diminuaient aucunement, malgré l’énorme consommation qu’en faisaient les habitans, qui s’en servaient, soit à l’état sec, comme combustible, soit à l’état liquide ou pâteux, pour cimenter les pierres de construction. Diodore de Sicile fait observer que tous les palais de la cité de Babylone, fondée par Sémiramis, avaient été bâtis à l’aide de ce ciment. Les importantes indications de l’historien grec n’ont pas encore été vérifiées, que je sache, la région dont il s’agit étant peu connue ; aussi, pendant mon séjour à Bagdad, me fut-il impossible de me procurer des renseignemens à cet égard.

En Afrique, c’est l’Egypte qui nous présente des gîtes de pétrole, sur le littoral du golfe de Suez, ainsi que dans la presqu’île de Iamsah, à 200 kilomètres de la ville de Suez. Le premier de ces gîtes se trouve au pied di : mont Djebel-Zeit, où l’existence du pétrole est connue depuis les temps les plus reculés. Le nom ancien de Mons-Petroleus et celui de Djebel-Zeit, qu’il porte aujourd’hui, ont exactement la même signification, savoir : montagne à l’huile, et plusieurs faits historiques prouvent que le pétrole a été usité par les Égyptiens, non-seulement dans les opérations de l’embaumement, mais aussi dans les exploitations de l’or et du porphyre pratiquées par eux entre Kosseïr et Bérénice (Bengazy d’aujourd’hui).

Quant au pétrole de la presqu’île de Iamsah, sa présence fut ignorée jusqu’à l’année 1763, lorsque le marquis de Bassano obtint du gouvernement égyptien l’autorisation d’exploiter le soufre sur les côtes de la Mer-Rouge, y compris le mont Djebel-Zeit. Le terme de la concession, fixé d’abord à trente ans, fut étendu plus tard jusqu’à 1809. Les concessionnaires commencèrent leurs travaux à Iamsah, où la présence du soufre dans un dépôt de gypse avait été