A force de vouloir bien faire, on avait trop fait. Le développement exagéré nuisait à la rapidité des mouvemens, et l’on comprit qu’il valait mieux multiplier les ambulances que de les surcharger. On les dédoubla et l’on adopta une sorte de règle uniforme qui assurait à chacun de ces petits hôpitaux mobiles 15 chirurgiens, 1 aumônier, 1 pasteur, 20 ou 30 infirmiers, 2 voitures qui contenaient de 60 à 100 brancards, de 4 à 6 tentes pouvant recevoir 20 lits chacune, des vivres et des fourrages pour la consommation d’une semaine, et enfin un fourgon contenant les boîtes d’instrumens de chirurgie, les linges de pansement, et une pharmacie de campagne. Dans l’espace d’un seul mois, la Société de secours fit partir 17 ambulances, qui rejoignirent les corps d’armée et se mirent aux ordres des commandans en chef. Si l’on songe qu’au début de la guerre rien n’était prêt, que rien n’avait même été prévu, on reconnaîtra que ce résultat démontre une vigueur d’initiative que rien n’a pu ralentir.
Ceux qui, à cette époque, ont visité le Palais de l’Industrie, ne l’ont pas oublié. C’était le quartier-général de la commisération et du dévoûment. On eût dit que chacun s’empressait de participer à cette guerre qui menaçait nos destinées. Pendant que nos soldats luttaient contre des masses ennemies au milieu desquelles ils tourbillonnaient sans parvenir à se faire jour, on accourait à leur aide, et la bonne France ne se réservait pas. Comme dans la chanson chère aux enfans, « l’un apportait du linge, l’autre de la charpie; » c’était par ballots, par charretées qu’arrivaient les objets de pansement, sans compter les vivres transportables, les flanelles contre la rigueur des nuits à la laide étoile, les vins réconfortans, les cigares pour les soirs de bivouac et l’argent qui est le nerf de la guerre, mais qui, entre des mains intelligentes, est bien souvent aussi l’instrument du salut. Après la bataille de Woerth (6 août), qui tue, blesse, fait disparaître dans les deux armées 27,527 hommes, on comprend que Paris sera attaqué et l’on se prépare à le défendre. On en presse l’armement, on y entasse les canons et les projectiles. Le hall du Palais de l’Industrie devient le magasin où, sans relâche, les camions versent les obus ; on accumule les engins de destruction à côté des vastes salles où la pitié recueille les objets de secours qui doivent atténuer les maux de la guerre et porter préjudice à la mort. L’activité était extrême ; des deux parts nul repos ; la barbarie et l’humanité rivalisaient de zèle pour ne point faillir à leur tâche.
Le labeur était excessif, et il fallut à la Société plus que de l’énergie soutenue par le sentiment du devoir pour n’y pas succomber. Jour et nuit l’on était sur pied ; les femmes étaient admirables : rien ne lassait leur courage et leur patriotisme. La maternité, qui est