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devant l’ennemi, au milieu même du combat, et ne point parvenir, malgré tant d’efforts, à remplacer ce que le temps seul peut obtenir de l’expérience et de la méditation. Sans plus tarder, comme si les clairons allaient sonner aux frontières, on reprit le travail et Ton s’ingénia à pourvoir noire Croix rouge d’une constitution à la fois élastique et solide qui lui permît d’être prête à répondre au premier appel, d’escorter le bataillon d’avant-garde, d’être maîtresse d’un personnel expérimenté, d’un matériel suffisant et d’être au devoir à la même minute que ceux qui seraient au péril. Après une campagne aussi désastreuse que celle que vous venions de subir, tout était à faire et tout fut fait, avec méthode et prudence, mais avec une persistance que rien n’a déroutée. Sous la présidence successive du Comte de Flavigny, du vicomte de Melun, intérimaire, du duc de Nemours, du maréchal de Mac-Mahon, la Société de secours aux blessés n’a jamais ralenti son zèle, et quoique sa fortune ne soit pas ce qu’elle devrait être, elle n’a rien négligé pour se parfaire et être une force adjuvante de premier ordre. Ce qui subsistait du matériel d’ambulance utilisé par la Société pendant la guerre était hors de service, ou peu s’en faut; l’expérience avait démontré, du reste, que les voitures, les brancards, les cacolets, construits sur d’anciens modèles, ne répondaient qu’insuffisamment aux exigences d’une armée en campagne. Pour les blessés, le transport est toujours une cause de souffrances, mais ces souffrances peuvent être amoindries si les voitures sont bien suspendues et ne les secouent pas, si les brancards sont larges, avec un support de tête à crémaillère, si les cacolets permettent de changer de position. On mit différens modèles à l’étude, et après des discussions où l’humanité seule fit entendre sa voix, on s’arrêta à différens types qui constituent sur le passé un tel progrès que le service médical des armées n’hésita pas à les adopter.

Il convient de désigner trois sortes de voitures qui sont destinées à rendre de grands services et qui sont dues à l’initiative de la Société. La première est la voiture attelée de deux chevaux, qui contient facilement 6 hommes couchés et 12 hommes assis: à proprement parler, c’est un omnibus d’ambulance; la seconde est le fourgon portant le matériel d’infirmerie, qui peut au besoin être transformé en voiture de transport pour les blessés ; la troisième est la voiture-cantine, qui, chargée de vivres, de fourneaux, de combustible, contient la nourriture nécessaire à l’alimentation de 200 hommes. Ces trois types irréprochables sont aux voitures d’autrefois ce que le fusil Lebel est au fusil à pierre. La voiture à deux roues et à un cheval, dont on a fait un si fréquent usage pendant la dernière guerre, a été rejetée par le comité d’études de la Société. On a sagement agi ; cette voiture est inhumaine;