Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 91.djvu/196

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pourrait appeler l’archipel de Koufara, puisqu’elle occupe une aire de 8,793 kilomètres carrés, mais elle a l’avantage de posséder une population permanente. Kebabo est presque partout revêtu d’herbages recherchés par les chameaux, tels que l’Alhagi camelorum ; et les forêts de palmiers témoignent de la fertilité de son sol.

Ce qui, sous le rapport météorologique, caractérise Koufara, ainsi que tout le désert libyen, c’est la puissance des phénomènes électriques, attestée par l’innombrable quantité de fulgurites répandus sur la surface du désert, notamment au sud de Fezzan, entre cette dernière oasis et Bornou. Quand on voit cette prodigieuse agglomération de masses vitreuses, de scories et de gigantesques tuyaux fulminaires, on est frappé par l’énergie et la fréquence des décharges électriques qui les ont fait naître. M. Rohlfs ne croit pas que dans le désert libyen ce phénomène se produise aujourd’hui sur la même échelle.

L’importance constamment croissante des oasis de Koufara, à cause du développement des relations qui s’établissent entre elles, se concentre pour le moment à Kebabo, où le chef-lieu, Suya-el-Istal, est devenu pour la secte des Snussi un foyer religieux. C’est une localité fortifiée entourée de murs ; elle possède une mosquée en pierre. L’altitude de Kebabo permet d’y cultiver non-seulement les fruits et les légumes de la zone subtropicale, mais encore ceux du bassin méditerranéen. Aussi, le jardin qui se trouve au pied du massif montagneux qui traverse Kebabo fournit une preuve frappante de la grande fertilité de l’oasis ; on y admire les délicieux bois plantés par les fanatiques apôtres des Snussi, qui, tout en renvoyant les fidèles au paradis promis par Mahomet, ont eu soin de réserver pour leur propre usage les dons de cette terre, en attendant ceux du ciel.

M. Rohlfs fait ressortir l’avenir réservé aux oasis de Koufara, autant en raison de leur fertilité que de leur position. Il croit qu’elles sont appelées à jouer un rôle important dans l’application du régime des chemins de fer à cette partie de l’Afrique. Ses espérances à cet égard sont tellement vives, qu’il prévoit déjà le jour où dans l’oasis retentira la voix du conducteur annonçant station Koufara, au milieu d’une foule d’indigènes offrant aux voyageurs des dattes cueillies le matin. Bien que ce rêve philanthropique ne soit nullement à la veille de se réaliser, il est impossible de ne pas apprécier les avantages que présente un groupe d’oasis fertiles, tel que celui de Koufara, situé vers le milieu d’une ligne de plus de 1,500 kilomètres, sur laquelle se déploie la surface unie du désert, depuis la Méditerranée jusqu’au Nil (à Ouadi-Halfa).

En dehors des oasis, quelques renflemens du soi beaucoup plus prononcés interrompent la surface unie du Sahara, parmi lesquels