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LES
ILES NORMANDES

On ne s’intéresse guère en France à ce qui se passe dans les îles de la Manche, et on y voit flotter le drapeau anglais avec autant d’indifférence que s’il s’agissait d’une station navale de l’Océan-Pacifique. Mais les touristes français commencent à les visiter, Jersey au moins, la plus voisine du groupe ; c’est l’occasion de faire une partie sur mer, de « voyager à l’étranger, » d’admirer des sites qu’on dit pittoresques.

Si court que soit le voyage, le Français trouve amplement matière à s’étonner. Pas de gendarmes!.. Non, pas de figures rébarbatives soupçonnant un malfaiteur dans tout nouveau-venu. Les deux ou trois policemen qui assistent au débarquement ne s’occupent qu’à vous aider à trouver un portefaix ou l’omnibus de votre hôtel. Pas davantage de douaniers, ni de visite de bagages! Descendez, allez, venez, ni la police ni l’autorité ne s’occupent de vous. Le capitaine du navire vous a demandé votre nom en vous retirant votre billet de passage, et c’est tout. Cet enregistrement n’est pas sans arrière-pensée ; mais la précaution est prise contre la compagnie des paquebots plus que contre le voyageur. Un étranger commet-il un délit, la justice du pays ne manque jamais d’ajouter à la prison et à l’amende le bannissement pour un certain nombre d’années. Or, dans une île, comment conduire un banni « à la frontière? » Avec cet enregistrement des noms, on retrouve le navire qui a introduit le délinquant, et la compagnie ou l’armateur est forcé de reprendre et d’emmener son ancien passager.