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rendus nécessaires par les désastres de 1870, et, de plus, 150 millions affectés spécialement à l’amortissement. Les comptes généraux des finances vont nous dire quelle progression rapide les dépenses ont suivie. En 1881, la dépense totale s’est élevée à 4,060 millions ; elle a donc dépassé de 968 millions la dépense de 1876, bien que les 150 millions d’amortissement eussent disparu du budget. Pour l’exercice 1882, la dépense totale a été de 4,190 millions, dépassant de 94 millions celle de l’exercice précédent. Nouveau progrès en 1883 : la dépense totale atteint 4,190 millions ; et le remboursement des obligations sexennaires, à leur échéance, est mis en question. C’est alors que M. Tirard jeta le fameux cri d’alarme qui troubla si profondément la béate quiétude de nos gouvernans. Un mouvement décroissant sembla se produire dans les dépenses, grâce à l’adoption du système des caisses, qui permettaient d’en dissimuler une partie en les rejetant en dehors du budget et en les soustrayant au contrôle de la Cour des comptes. En 1884, la dépense totale n’est plus que de 4,024 millions, et en 1885 elle serait descendue à 3,686 millions, si l’on pouvait s’en rapporter aux chiffres du budget ; mais le compte général des finances constate une dépense effective de 3,943 millions, supérieure de 852 millions à celle de 1876. Pour les années 1886, 1887 et 1888, nous n’avons plus que les chiffres des budgets votés par les chambres ; mais, en ajoutant au budget ordinaire le budget sur ressources spéciales, le budget extraordinaire et les crédits supplémentaires votés ou demandés, on arrive à une dépense qui oscille entre 3,900 millions et 4,100 millions. Pour 1889, le budget ordinaire et le budget sur ressources spéciales sont prévus ensemble à 3,450 millions : les 550 millions de dépenses extra-budgétaires que nous avons énumérées portent la dépense totale à 4 milliards.

Au cours de la discussion du budget de 1889, il a été fait divers calculs pour évaluer la progression que les dépenses avaient suivie de 1878 à 1889. M. Tirard, lorsqu’il était ministre des finances et responsable, à ce titre, de l’équilibre du budget, avait qualifié de politique du délire la fièvre de dépense qui s’était emparée du gouvernement et des chambres, et dont on vient de voir les résultats. En décembre 1888, comme président de la commission des finances du sénat, il s’est fait, devant cette assemblée, l’apologiste de cette politique, si sévèrement jugée par lui ; il a défendu la multiplication hâtive des chemins de fer improductifs, et il a glorifie les prodigalités dont l’instruction primaire a été le prétexte, mais, arrive à la question des dépenses, il a reconnu qu’elles seraient accrues de 450 millions dans cette période de dix années, pour le seul budget ordinaire. Le rapporteur du sénat, M. Boulanger,