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inégalités. Le paysage alpestre de M. Guétal, chauffé par le soleil couchant, le Massif de la Grande-Chartreuse, vu des Vouillans, est bien près d’être un chef-d’œuvre autant par la vigueur continue de l’exécution que par la majesté simple de la mise en scène. M. Quignon a tiré d’un Champ de blé noir au soleil, un effet violent, mais saisissant. Parmi ceux qui expriment le mieux la solennité de l’espace, dans nos campagnes de France, ouvertes et plates, mais si plaisantes pourtant par l’abondance des floraisons et par la variété des cultures, les plus remarquables peut-être sont deux peintres qui procèdent, pour rendre les mêmes impressions, par des moyens absolument différens : l’un est M. Damoye, un peintre chaleureux, qui a l’une des touches les plus vives, les plus libres, les plus larges de l’école ; l’autre est M. Jan-Monchablon, dont le travail de patience au pointillé est le plus minutieux, le plus détaillé, le plus lin qu’on ait jamais vu.

Après les paysagistes il faudrait parler des animaliers, après les animaliers, des peintres dits de natures mortes, peintres de lieurs, de fruits, de chaudrons, de bimbelots, de comestibles. A mesure qu’on s’éloigne de la figure humaine, on devient peintre à meilleurs frais. Dans tous ces genres secondaires, l’habileté courante et médiocre est presque générale. Toutefois on y rencontre quelques ouvrages supérieurs, portant un caractère d’unité due à la concentration de l’effet et au soin soutenu de l’exécution. Parmi les animaliers, MM. C. Paris et Barillot méritent d’être remarqués, l’un pour sa Jeune Taure égarée, l’autre pour ses Mauvaises herbes. On regardera avec plaisir le Cellier de M. Vollon, la Nature Morte de M. Zakarian, le Déjeuner de Carême de M. Fouace, le Chez Gargantua de M. D. Rozier, les Poissons de M. Joseph Bail, l’Encensoir de Mlle de Hem, les fleurs de MM. Kreyder, Grivolas, Bourgogne,. etc.


IV

La section de sculpture s’est plus ressentie que la section de peinture de la coïncidence de l’Imposition décennale au Champ de Mars. Une statue ne s’improvise pas comme un tableau ; beaucoup de sculpteurs, voulant figurer à l’Exposition universelle, ont dû renoncer à paraître au Salon. Toutefois, les chefs de l’école, MM. Dubois, Fremiet, Falguière, Chapu, Mercié, Barrias, ont tenu à se montrer partout, et les œuvres qu’on voit d’eux aux Champs-Elysées sont tout à fait dignes de leur renommée. Les deux statues équestres de Jeanne d’Arc, l’une par M. Fremiet, l’autre