qu’elle fût établie, comment les choses se passeraient-elles ? A l’origine, ceux mêmes qui s’étaient montrés les plus violens avaient du moins fait acte de prévoyance. Avant l’arrêt rendu par la Convention contre les diverses Académies, le projet de substituer à celles-ci une institution unique avait été, avec l’assentiment de Mirabeau, soumis à une autre assemblée et soutenu à plusieurs reprises par Talleyrand et par Condorcet ; mais la différence était grande entre les mesures proposées alors et celles qui venaient d’être édictées. Les orateurs de la Constituante et de l’Assemblée législative n’entendaient supprimer les Académies qu’à la condition d’installer immédiatement à leur place un corps nouveau ayant ses attributions définies ; les auteurs du décret soumis au vote de la Convention et adopté par elle renversaient tout au contraire, sans rien reconstruire. Au lieu d’une décision arrêtée et immédiatement applicable, ils se contentaient de formuler un vœu pour la réalisation duquel ils s’en remettaient à l’avenir. C’était implicitement consacrer le désordre ou, tout au moins, prendre avec une singulière résignation son parti des événemens fâcheux qui pourraient se produire et qui se produisirent en effet dans le domaine des lettres et des arts, jusqu’au jour où la fondation de l’Institut vint couper court aux fantaisies de l’esprit de destruction à outrance.
En attendant, les artistes, y compris même quelques-uns de ceux qui avaient appartenu à l’ancienne Académie de peinture, essayaient de se grouper dans une association semi-officielle et de réparer, s’il était possible, l’échec qui avait suivi un premier essai d’organisation. Dès l’année 1790, en effet, à l’instigation de David et avec le concours d’autres académiciens dissidens, une société s’était formée sous le titre de « commune des arts. » Elle avait appelé à elle tous les peintres et tous les sculpteurs non privilégiés, dans l’espoir sinon de contre-balancer auprès du public l’influence de la corporation académique, au moins de détourner à son profit quelque chose du crédit dont celle-ci jouissait depuis plus d’un siècle. Or les espérances de David et des siens avaient, à ce moment, été déçues. L’opinion publique, quoiqu’à demi détachée déjà de l’académie, était restée indifférente aux entreprises du parti contraire ; l’assemblée nationale, occupée d’autres soins, n’avait accueilli qu’avec une bienveillance un peu distraite les adresses présentées au nom de la nouvelle société et, plus tard, tout en reconnaissant par un décret l’existence légale de la commune des ails, la Convention elle-même n’avait pas paru disposée à se mêler fort activement de ses affaires. Enfin, entre les associés si bien unis au début contre l’ennemi commun, certaines difficultés s’étaient élevées qui les avaient partagés en deux groupes : d’un côté, les