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dans la seconde classe, Champagne et Lescallier devenaient les successeurs de Pastoret et de Barthélémy.

Peut-être sera-t-il permis de dire qu’en consentant de si bonne grâce à remplacer des confrères dépouillés de leur titre contre toute justice et tout droit, l’Institut ne laissait pas, au moins en apparence, d’accepter le fait accompli un peu facilement et un peu vite ; peut-être, sans recourir à des protestations bruyantes, sans tenter des efforts de résistance inutiles d’avance dans les circonstances où l’on se trouvait, lui eût-il été possible, au nom de cette solidarité même établie par la loi organique, de témoigner quelque chose du sentiment de l’injure reçue et de prendre une autre attitude que celle d’une résignation toute passive. Sans doute, quand de nouvelles vacances viendront plus tard à se produire dans les classes décimées en 1797, l’Institut rouvrira ses rangs à ceux que le triste pouvoir d’alors avait proscrits ; les quatre premières années du XIXe siècle ne se seront pas écoulées encore que tous, sauf Barthélémy, auront été réélus par leurs anciens confrères ou réintégrés par arrêtés du gouvernement ; mais, au moment où l’iniquité était commise, fallait-il donc la subir sans donner même un signe de désapprobation, sans essayer, par quelque rappel, si réservé qu’il fût dans les termes, aux règlemens et à la loi, de prévenir au moins le retour de pareilles violences ? Cette docilité si générale et si prompte créait en réalité un dangereux précédent. Qui sait si le gouvernement de la restauration n’en gardait pas le souvenir lorsque, à près de vingt ans d’intervalle, il entreprenait à son tour de sévir dans le sein de l’Institut contre d’autres ennemis ou d’autres suspects ? Peut-être les ministres de Louis XVIII auraient-ils hésité à exclure de leurs académies respectives David, Monge, Grégoire, et plusieurs autres, si la mesure prise autrefois par le Directoire avait rencontré chez les confrères des hommes qu’elle frappait moins d’empressement à se soumettre ou moins d’inclination à se taire.

Aucun des artistes appartenant à la troisième classe n’avait été, nous l’avons dit, atteint par le coup d’état de fructidor. Les quatre sections formant la seconde moitié de cette classe demeuraient donc, quant au personnel qu’elles comprenaient, dans le même état qu’à l’origine ; mais, en dehors de leur participation obligatoire aux travaux, aux élections, aux tâches, de quelque nature qu’elles fussent, imposées à l’ensemble de l’Institut, elles n’avaient eu jusqu’alors pour leur propre compte ni une existence fort remplie, ni des moyens d’influence fort directs. L’unité d’action en toutes choses dont on avait entendu faire la condition essentielle et comme la raison d’être de l’Institut était un principe si littéralement observé qu’on avait été jusqu’à établir que les jeunes artistes à envoyer chaque année