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mon aise, paraître davantage, ce que je ferai mieux ayant un logis à moi. »

Tandis que l’abbé de La Cochère et Mme de Bourges veillent ainsi sur les premiers pas de leur ami, celui-ci écrivait à divers personnages, à son métropolitain, M. de Sourdis, alors à Paris, à l’évêque de Maillezais, frère de ce cardinal, au père Cotton, que la reine retient à la cour et dont elle demande les avis, à d’autres encore. C’est toujours le fidèle doyen qui est chargé de remettre les lettres dont le texte nous manque. Mais nous savons par les réponses de l’abbé qu’elles produisaient leur effet, que le père Cotton « assurait l’évêque de tout son service » ; que M. de Souvré disait beaucoup de bien de lui « selon la réputation que vos mérites vous ont acquise par toute la France. » On ajoutait même que si le jeune évêque se fût trouvé à Paris, on eût probablement confié à son éloquence l’oraison funèbre du roi défunt.

Ce séjour à Paris, sur lequel il comptait tant, ne paraît pas avoir produit les résultats immédiats que Richelieu s’en promettait. La reine, absorbée par les premiers soucis du pouvoir, assiégée par les premières convoitises des grands, n’avait pas encore pris la direction effective des affaires. Les anciens ministres de Henri IV continuaient à gérer les intérêts publics. La place n’était pas prête pour les nouveaux venus.


Richelieu quitta bientôt Paris, abattu, découragé, rongé par la fièvre. Il ne rentra pas à Luçon. L’air des marais lui était tout à fait contraire. Il avait des difficultés graves avec son chapitre, avec ses grands vicaires ; il écrit à ceux-ci dans des termes violens, qui ne sont pas de sa manière habituelle, mais qui découvrent le fond d’un caractère autoritaire et passionné : « Vous êtes tous deux mes grands vicaires, et comme tels vous devez n’avoir d’autre dessein que de faire passer toutes choses à mon contentement, ce qui se fera, pourvu que ce soit à la gloire de Dieu. Il semble par votre lettre que vous étiez en mauvaise humeur, lorsque vous avez pris la plume. Pour moi, j’aime tant mes amis que je désire ne connoître que leurs bonnes humeurs et il me semble qu’ils ne devroiont point en faire paroître d’autres. Si une mouche vous a piqués, vous la deviez tuer et non en faire sentir l’aiguillon aux autres… Je sais, Dieu merci, me gouverner et sais davantage comme ceux qui sont sous moi doivent se gouverner. Vous me mandez qu’il ne vous chaut de ce qui se passe, disant que l’affaire me touche plus qu’à vous. Je trouve bon que vous m’avertissiez des désordres qui sont en mon diocèse ; mais il est besoin de le faire plus froidement, n’y ayant point de doute que la chaleur