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Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 94.djvu/655

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township faisait tous ses règlemens locaux (by-laws), à condition qu’ils ne fussent pas contraires aux lois générales ; il avait une cour de justice et une compagnie de milice ; il choisissait sans contrôle tous ses fonctionnaires et élisait les délégués qui le représentaient au general court, c’est-à-dire à l’assemblée plénière de la province.

Pour prendre part à la réunion ordinaire des habitans, qui avait lieu, chaque année, en mars, comme chez les Francs et les anciens Germains, il fallait posséder une propriété, freehold, d’un certain revenu, fin outre, les selectmen, dont le nombre variait de trois à neuf, devaient convoquer une assemblée extraordinaire chaque fois que dix freeholders ou propriétaires le demandaient.

Le gouvernement direct était le principe essentiel. Les électeurs nommaient des fonctionnaires spéciaux pour chaque service, au lieu de confier ces soins d’administration aux conseillers communaux, comme nous le faisons en Europe. Dans la réunion du mois de mars, on choisissait le constable qui veillait au maintien de l’ordre et parfois à la rentrée des impôts, le surveillant des chemins (surveyor of the highways) qui avait le droit de requérir les corvées de travail manuel et de charroi nécessaires pour l’entretien des routes, les maîtres des pauvres (overscers of the poor) qui distribuaient les secoure aux indigens et aux infirmes, les percepteurs des impôts (collector of taxes) qui prélevaient les contributions levées en proportion de l’avoir de chacun, le secrétaire (town clerk) qui inscrivait dans des registres les votes émis, les règlemens arrêtés, les dépenses votées, les naissances, les décès et les mariages, et qui citait à comparaître devant la cour de justice locale : les surveillans des haies (fence viewers) qui veillaient à ce que toutes les clôtures fussent en bon état et « hautes au moins de 4 pieds, » les gardiens (wardens) qui s’occupaient de tout ce qui concernait la moralité, — ivresse, cruauté à l’égard des animaux, actes obscènes, immoraux ou sacrilèges, — et enfin les membres du grand et du petit jury.

Dans les villages des États-Unis, l’ancienne forme démocratique du gouvernement s’est maintenue à peu près intacte et, comme en Grèce et dans les Landsgemeinde des cantons primitifs de la Suisse, ce sont les habitans réunis sur la place publique, à certaines époques, qui font les règlemens, votent les dépenses et les impôts, nomment les fonctionnaires et, en somme, s’administrent eux-mêmes directement. C’est le self-government dans toute la force du terme. Mais, dans certaines localités, la population s’est accrue et la richesse s’est accumulée : des villes se sont formées. L’état en a fait des « corporations, » c’est-à-dire des « cités, » en leur donnant une charte qui détermine leur régime administratif. Il ne pouvait