Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 94.djvu/940

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

M. Maubant, lequel n’a jamais éveillé que des impressions majestueuses. Je croirais plutôt que la foule reporte en entier sur ces personnages publics les sentimens désormais sans emploi qu’elle témoignait jadis aux grands, aux rois. « Cet effet a son origine dans la coutume, » disait Pascal ; et il ajoutait sur le prestige des rois, des grands, sur la force et sur la grimace, des choses trop libres pour qu’on se permette de les appliquer aux acteurs.

La section suivante est consacrée à l’histoire des moyens de transport. Encore une idée originale des organisateurs de cette exposition. L’histoire du travail nous fait assister à la lutte de l’homme contre la matière ; histoire du transport à sa lutte contre l’espace ; elle nous donne le raccourci du mouvement ambulatoire qui l’emporte sur le globe, depuis son premier pas au sommet de quelque plateau d’Asie, si c’est de là qu’il est parti, jusqu’à ses courses actuelles sur les voies rapides qui sillonnent la planète. Au rez-de-chaussée, dans les quatre divisions principales : voie de terre, voie de fer, voie fluviale, voie maritime, on a groupé les modèles des ouvrages d’art exécutés pour les besoins de la voirie et de la navigation, chez les anciens et chez les modernes ; on a réuni dans ce petit emplacement quelques véhicules historiques. L’Angleterre a envoyé la première locomotive de Stephenson et le wagon où voyageait Wellington. Sur la terrasse, des gravures et des photographies racontent les progrès de la locomotion, du chariot des pasteurs nomades jusqu’à nos trains-éclairs. Il n’est presque pas un de ces chars et de ces attelages dont on ne retrouverait le type en un coin de l’Asie ou de l’Afrique. Sans aller si loin, les bourgeois de Beauvais se font encore tirer à bras d’hommes dans des vinaigrettes, cent ans après la déclaration des droits. Chaque époque révèle son caractère dans son roulage. Les photographies prises sur des manuscrits du moyen âge composent une série très amusante ; vous y verrez le pape et l’empereur faisant route de compagnie dans un équipage tout pareil à nos voitures de blanchisseuses. Plus réjouissantes encore sont les lithographies de 1830, représentant les cabriolets et les mylords des héros de Balzac, la cour de Laffite et Caillard, les écossaises et les favorites d’où est issu notre omnibus démocratique. Le dernier terme de cette progression, en attendant mieux, est le chemin de fer à glissières qu’on essayait l’autre semaine sur l’esplanade des Invalides et qui promet de nous porter en quatre heures à Marseille. Quand je dis le dernier terme, c’est selon qu’on l’entend ; d’autres réserveraient cette qualification à des voitures plus lentes, qui ont aussi leur histoire dans la collection, et que vous avez chance de rencontrer en ressortant le matin de l’Exposition. Elles s’en reviennent à vide de Montparnasse, avec cet air de bon débarras, ce je ne sais quoi de guilleret qui