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constitution que Napoléon, dans les derniers jours de son règne, avait entendu lui donner. Tout en changeant le nom, Louis XVIII conservait donc la chose ; il procédait, en ce qui concernait l’Académie des Beaux-Arts, à peu près de la même façon qu’à l’égard de la Légion d’honneur dont il décrétait le maintien, sauf à feindre d’en oublier les origines et à substituer sur les croix des légionnaires l’effigie d’Henri IV à celle du fondateur de l’ordre. Ajoutons toutefois que le rétablissement de l’ordre de Saint-Michel, dont plusieurs membres de l’Académie des Beaux-Arts avaient été aussitôt nommés chevaliers, — la date de la séance annuelle des cinq Académies fixée au jour de la fête du roi, — l’usage, renouvelé du XVIIIe siècle, de convoquer ce jour-là les académiciens à Saint-Germain-l’Auxerrois pour y entendre le panégyrique de saint Louis prononcé par un des aumôniers de la cour, — quelques autres traditions du même genre remises en honneur au temps de la seconde restauration, ne laissaient pas de compenser dans une certaine mesure les emprunts qu’il avait fallu faire forcément au consulat et à l’empire, et de rattacher le présent aux souvenirs d’un passé moins récent. Toujours est-il que la réorganisation de la quatrième classe opérée en 1816, et confirmée par la pratique dans les dernières années du règne de Louis XVIII, devait demeurer définitive. Depuis cette époque jusqu’à nos jours, aucune modification n’a été apportée aux statuts de la Compagnie, tandis que, dans le laps de temps qui s’était écoulé à partir de la fondation de l’Institut, elle avait passé par une succession de tâtonnemens et de réformes tantôt générales, tantôt partielles.

Ce qu’on pourrait appeler dans l’histoire de l’Académie la période initiale (1795-1824) prend donc fin avec le règne de Louis XVIII. Pendant les soixante-cinq années suivantes, malgré le nombre et la diversité des gouvernemens tour à tour imposés à la France, l’Académie des Beaux-Arts, comme les autres classes de l’Institut, a pu poursuivre ses travaux sans subir le contre-coup des révolutions politiques, sans être troublée non plus par aucun changement de régime intérieur. Les hommes qui l’honoraient il y a un demi-siècle, aussi bien que ceux qui l’illustrent encore, n’ont eu pour en continuer la gloire qu’à en appliquer invariablement les lois.


HENRI DELABORDE.