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tabacs et cigares ; un monumental escalier à double voie donne accès aux galeries supérieures où s’entassent les collections d’objets d’art, les produits naturels et industriels. Le jour tombe de haut, éclairant d’une manière uniforme, sans ombres ni reflets, les murailles tapissées d’objets.

Dans les deux pavillons, des groupes symboliques personnifient le passé. Les divinités aztèques, dieux de l’agriculture et des pluies, des arts, de la chasse et du commerce, les guerriers de l’antique histoire, depuis Izcoati, fondateur de la monarchie, jusqu’à Cuilahuac, le héros de la noche triste, contemplent, impassibles, la marche d’une civilisation nouvelle, d’un art et d’une industrie ignorés d’eux.

Principal instrument de la conquête du Mexique, le cheval et l’équipement du cheval figurent en place d’honneur à l’exposition mexicaine. Ils attirent et captivent les regards de la foule qui se presse autour de ces selles merveilleuses rehaussées de plaques d’argent, de ces sombreros aux lourdes ganses d’argent, de ces costumes pittoresques du caballero classique, de ces souples lassos, de ces mors et éperons d’argent massifs, de ces élégans ponchos. On comprend le rôle que joue le cheval dans la vie du Mexicain, dont il est l’inséparable compagnon, piédestal de l’homme auquel il donne toute sa valeur, qui ne se sent lui-même que sur son dos, cavalier infatigable, dompteur émérite, médiocre agriculteur, intelligent éleveur, dédaigneux du travail manuel, qu’il estime servile, qu’il abandonne à l’Indien, mettant son orgueil et, sa joie à parader dans les rues de sa grande capitale ou à courir dans les vastes pampas, portant souvent sur lui tout ce qu’il possède, boulons, plaques d’or ou d’argent incrustés dans sa selle et surchargeant ses vêtemens.

Dix millions d’hommes, dont près de 7 millions d’Indiens, peuplent les vingt-sept états de la république, échelonnés sur les côtes de l’Atlantique et du Pacifique, sur les hauts plateaux, qui, à eux seuls, comprennent les trois quarts de la superficie du Mexique et que les montagnes abritent des vents des deux océans. Dans la région du nord, le bétail abonde, dans les États du contre les mines d’argent ont produit d’incalculables richesses et donnent encore d’énormes rendemens. Si les jours sont passés où don Pedro Torreros retirait des mines de Real del Monte 132 millions et achetait à Charles III le titre de comte de Régla, les minerais qu’expose le Mexique attestent que l’antique richesse de ses mines est encore loin d’être épuisée ; la mine de Santa-Gertrudis a payé à ses actionnaires, en peu d’années, trente-neuf dividendes de 100,000 francs chacun.

Dans ces vingt dernières années, le Mexique, en paix à